Jules Verne, né le 8 février 1828 à Nantes et mort le 24 mars 1905 à Amiens, est un écrivain français dont l’œuvre est, pour la plus grande partie, constituée de romans d’aventures évoquant les progrès scientifiques du XIXe siècle.
Bien qu’il ait d’abord écrit des pièces de théâtre, Verne ne rencontre le succès qu’en 1863 lorsque paraît, chez l’éditeur Pierre-Jules Hetzel (1814-1886), son premier roman, Cinq Semaines en ballon. Celui-ci connaît un très grand succès, y compris à l’étranger. À partir des Aventures du capitaine Hatteras, ses romans entreront dans le cadre des Voyages extraordinaires, qui comptent 62 romans et 18 nouvelles, parfois publiés en feuilleton dans le Magasin d’éducation et de récréation, revue destinée à la jeunesse, ou dans des périodiques destinés aux adultes comme Le Temps ou le Journal des débats.
Les romans de Jules Verne, toujours très documentés, se déroulent généralement au cours de la seconde moitié du XIXe siècle. Ils prennent en compte les technologies de l’époque — Les Enfants du capitaine Grant (1868), Le Tour du monde en quatre-vingts jours (1873), Michel Strogoff (1876), L’Étoile du sud (1884), etc. — mais aussi d’autres non encore maîtrisées ou plus fantaisistes — De la Terre à la Lune (1865), Vingt Mille Lieues sous les mers (1870), Robur le Conquérant (1886), etc.
Outre ses romans, on lui doit de nombreuses pièces de théâtre, des nouvelles, des récits autobiographiques, des poésies, des chansons et des études scientifiques, artistiques et littéraires. Son œuvre a connu de multiples adaptations cinématographiques et télévisuelles depuis l’origine du cinéma ainsi qu’en bande dessinée, au théâtre, en musique ou en jeu vidéo.
Jules Verne est populaire dans le monde entier ; selon l’Index Translationum, avec un total de 4 702 traductions, il vient au deuxième rang des auteurs les plus traduits en langue étrangère après Agatha Christie1. Il est ainsi, en 2011, l’auteur de langue française le plus traduit dans le monde. L’année 2005 en France a été déclarée « année Jules Verne », à l’occasion du centenaire de la mort de l’écrivain.
À l’occasion de visites de salon, il entre en contact avec Alexandre Dumas67 par l’intermédiaire d’un chiromancien célèbre de l’époque, le chevalier Casimir d’Arpentigny. Il se lie d’amitié avec le fils de l’écrivain et lui propose le manuscrit d’une comédie intitulée Les Pailles rompues. Les deux hommes corrigent la pièce et Dumas fils obtient de son père qu’elle soit jouée au Théâtre-Historique. Nous sommes le 12 juin 1850, Jules Verne a vingt-deux ans.
En 1851, il rencontre Pierre-Michel-François Chevalier dit Pitre-Chevalier (1812-1863). Celui-ci, breton et nantais comme Jules Verne, est directeur et rédacteur en chef de la revue Musée des familles. Verne lui soumet une nouvelle, Les Premiers Navires de la marine mexicaine qui parait dans la revue de Pitre-Chevalier en juillet 1851 et qui sera repris, mais remanié, en 1876 chez Hetzel à la suite de Michel Strogoff sous le titre Un drame au Mexique.
La même année Pitre-Chevalier accepte une deuxième nouvelle, Un voyage en ballon, qui, en 1874, prendra comme titre Un drame dans les airs, chez Hetzel.
Sans doute par l’entremise d’Alexandre Dumas fils, en 1852, Verne entre en relation avec les frères Seveste qui viennent de reprendre le Théâtre-Historique après la faillite due aux prodigalités de Dumas père. La nouvelle salle devient le Théâtre-Lyrique. Jules Seveste, le nouveau directeur, engage Verne comme secrétaire. Un travail astreignant, car le jeune homme ne touche d’abord pas de salaire avant d’être rémunéré à hauteur de 100 F. En revanche, il peut faire jouer ses pièces, la plupart écrites en collaboration avec Michel Carré.
En janvier 1852, il prend sa décision et refuse la charge d’avoué que son père lui propose. « Je me bornerai à voir si je ferais bien de prendre ta charge, au point de vue moral et matériel. […] D’un autre côté, je commence à bien me connaître ; ces coups de tête contre lesquels tu cherches à me prémunir, je les ferais, tôt ou tard ; j’en suis certain ; la carrière qui me conviendrait le plus, ce serait celle que je poursuis ; […] si je ne puis parvenir, non par manque de talent, mais par défaut de patience, par découragement, eh bien, ce qui me conviendra le plus au monde, ce sera le barreau qui me ramènerait à Paris. […] C’est parce que je sais ce que je suis, que je comprends ce que je serai un jour ; comment donc me charger d’une étude que tu as faite si bonne, que ne pouvant gagner entre mes mains, elle ne pourrait qu’y dépérir. » Un an plus tôt, il avait écrit à sa mère : « […] je puis faire un bon littérateur, et ne serais qu’un mauvais avocat, ne voyant dans toutes choses que le côté comique et la forme artistique et ne prenant pas la réalité sérieuse des objets. […] ».
Il fréquente la Bibliothèque nationale85. Au début de 1851, Verne fait la connaissance du géographe et infatigable voyageur, Jacques Arago, célèbre pour un récit de Voyage autour du monde qu’il a fait sur L’Uranie avec la mission de Freycinet entre 1817 et 1821, qui continue à parcourir le monde malgré sa cécité et qui publie le récit de ses voyages autour du monde sous le titre Souvenirs d’un aveugle. Le jeune écrivain retrouve près de lui toutes les sensations de ses premières lectures. Jacques Arago lui ouvre des horizons et l’entraîne vers un genre nouveau de littérature, alors en pleine expansion, le récit de voyage.
En 1852, deux autres textes de Verne paraissent dans le Musée des familles : Martin Paz, une longue nouvelle et une comédie-proverbe en un acte, en collaboration avec Pitre-Chevalier Les Châteaux en Californie.
En août 1853, il s’éloigne un moment de Paris pour se rendre à La Guerche, où son oncle Prudent offre un grand repas afin de fêter le retour de Paul Verne, le frère de Jules, aspirant auxiliaire dans la marine. Avec son ami Aristide Hignard, Jules Verne fréquente le salon du musicien Talexy qui sera plus tard un des « Onze sans femmes » ils se lancent dans l’opérette, ou plutôt l’opéra-comique, au moment où Jacques Offenbach crée un véritable engouement pour ce genre de spectacle. Le 28 avril 1853, est représenté Le Colin-maillard au Théâtre-Lyrique. C’est une période où Jules Verne ne cesse d’écrire. Des nouvelles de cette époque, on peut citer Pierre-Jean et Le Siège de Rome qui restera inédit jusqu’en 1994. Il travaille aussi sur Monna Lisa commencé dès 1851 et qu’il ne finira qu’en 1855.
Au cours d’un séjour à Nantes, l’écrivain s’est amouraché de Laurence Janmar99. En janvier 1854, le président Janvier de la Motte donne un grand bal travesti100. Le jeune écrivain y retrouve celle qu’il convoite. Laurence Janmar101, habillée en gitane, se plaint à son amie que son corset, trop riche en baleines, lui meurtrit les côtes. Verne, toujours à l’affût d’un bon mot, soupire alors : « Ah ! que ne puis-je pêcher la baleine sur ces côtes ? ». Laurence Janmar épousera finalement un certain Charles Louis Salomon Duvergé le 2 août 1854.
Le vendredi 30 juin 1854, Jules Seveste meurt d’une apoplexie foudroyante. Son successeur, Émile Perrin, tente de retenir Jules Verne, mais ce dernier tient à garder sa liberté. Perrin va jusqu’à lui proposer la direction du Théâtre-Lyrique. « J’ai refusé. Il m’a même offert de diriger le théâtre, moi seul, tout en restant directeur en nom et ayant une part dans les bénéfices ; j’ai refusé encore ; je veux être libre et prouver ce que j’ai fait. » Dans le Musée, en avril 1854, un nouveau texte de l’écrivain : Maître Zacharius ou l’Horloger qui avait perdu son âme, un conte fantastique profondément imprégné de l’influence d’Hoffmann. Zacharius, maître-horloger de Genève, a rendu ses horloges si régulières qu’elles sont devenues parfaites… Mais un jour, elles se dérèglent une à une.
Malgré son refus de devenir directeur du Théâtre-Lyrique, Verne y conserve son poste de secrétaire jusqu’à fin 1855, ce qui lui permet de représenter, le 6 juin de cette année, un second opéra-comique écrit sur une musique d’Hignard, Les Compagnons de la Marjolaine qui connaîtra vingt-quatre représentations. Jules Verne écrit à son père : « J’étudie encore plus que je ne travaille ; car j’aperçois des systèmes nouveaux, j’aspire avec ardeur au moment où j’aurai quitté ce Théâtre-Lyrique qui m’assomme. ».
C’est une période d’intense activité créatrice. Les pièces de théâtre s’accumulent. Il peaufine notamment l’une d’entre elles, une comédie en cinq actes en vers, Les Heureux du jour, qui semble lui tenir particulièrement à cœur. Il écrit plusieurs nouvelles, dont Le mariage de M. Anselme des Tilleuls et Un hivernage dans les glaces. Cette dernière paraît en 1855 dans le Musée des familles118 et sera reprise mais modifiée par Hetzel en 1874 pour paraître dans le volume de nouvelles Le Docteur Ox. De tous les manuscrits de Verne avant sa rencontre avec Hetzel, c’est celui qui se rapproche le plus des Voyages extraordinaires, véritable prélude aux Aventures du capitaine Hatteras. À cette époque, il est atteint d’une deuxième crise de paralysie faciale. Son ami et médecin Victor Marcé le soigne à l’aide de l’électricité. Il déménage et s’installe au cinquième étage d’un immeuble au 18 boulevard Poissonnière.
Jules Verne parle alors de mariage dans presque toutes les lettres à sa mère ; il lui demande de lui trouver une épouse, parfois sur le ton de la plaisanterie : « J’épouse la femme que tu me trouveras ; j’épouse les yeux fermés et la bourse ouverte ; choisis, ma chère mère, c’est sérieux ! » ou « Trouvez-moi une femme bossue et qui ait des rentes — et tu verras. ». Mais on sent bien que l’angoisse de l’avenir le tiraille : « Toutes les jeunes filles que j’honore de mes bontés se marient toutes invariablement dans un temps rapproché ! Voire ! Mme Dezaunay, Mme Papin, Mme Terrien de la Haye, Mme Duverger et enfin Mlle Louise François. ». Après le mariage de Laurence Janmar avec Duvergé, Verne, amoureux éconduit, s’interroge. Pour le consoler, sa mère l’envoie en avril 1854 à Mortagne pour y connaître un bon parti. Il lui répond dans une lettre où il invente une rencontre avec le père de sa future, d’un humour scatologique et agressif.
En mars 1856, Auguste Lelarge, ami de Jules Verne va se marier avec Aimée de Viane. Il demande à l’écrivain d’être son témoin. Celui-ci accepte. Le mariage doit se dérouler le 20 mai à Amiens, ville de la fiancée. À l’occasion de son séjour, Verne y fait la connaissance de la sœur de la mariée, Honorine, veuve à 26 ans d’Auguste Morel et mère de deux filles129, Louise Valentine (1852-1916) et Suzanne Eugénie Aimée (1853- ?).
En 1861, après avoir proposé le Voyage en Angleterre et en Écosse qui est refusé par Pierre-Jules Hetzel, Jules Verne lui soumet un manuscrit nommé Un voyage en l’air. Hetzel lui demande de le retravailler de manière plus scientifique avec déjà l’idée d’inventer une littérature vulgarisant la science. Jules Verne revient quelques semaines plus tard avec ce qui deviendra son roman Cinq Semaines en ballon. Celui-ci paraît le 15 janvier 1863 et connaît un immense succès, même au-delà des frontières françaises. Le premier tirage est de 2 000 et du vivant de l’auteur, il s’en vendra 76 000. Il signe l’année suivante avec Pierre-Jules Hetzel un contrat aux termes duquel il s’engage à fournir deux volumes par an. En 1865, un nouveau contrat l’engage à trois volumes à l’année. Jules Verne s’engage à fournir des romans notamment pour le Magasin d’éducation et de récréation, revue destinée à la jeunesse. En fait, il va travailler pendant quarante ans à ses Voyages extraordinaires qui compteront 62 romans et 18 nouvelles et signera avec son éditeur six contrats consécutifs.
Dans la foulée de ce succès, Jules Verne propose à son éditeur un récit qu’il a écrit vers 1860, Paris au XXe siècle. L’éditeur, en termes violents, refuse absolument ce travail qu’il juge nuisible à sa réputation et va à l’encontre de l’idée qu’il se fait de Verne. Abandonné, le roman ne sera publié finalement qu’en 1994 par Hachette et Le Cherche midi associés.
Dès le 27 février 1863, Jules Verne est admis comme membre de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques. Le 4 octobre 1863, son ami Nadar l’invite au lancement du ballon Géant, qui a lieu depuis le Champ-de-Mars à Paris188. Le 26 décembre 1863, il fait paraître dans le Musée des familles un article relatant l’expérience de Nadar (À propos du Géant). Le photographe crée alors avec Gabriel de La Landelle la Société d’encouragement de la locomotion aérienne au moyen du plus lourd que l’air, dont Jules Verne est le censeur.
Vers cette époque, il découvre l’univers d’Edgar Poe au travers des traductions de Charles Baudelaire190. L’écrivain américain le fascine, au point qu’il lui consacre la seule étude littéraire qu’il ait écrite, parue en avril 1864 dans le Musée des familles : Edgard Poe et ses œuvres.
C’est à cette date (1864) qu’il publie le roman Aventures du capitaine Hatteras, ouvrage qui paraît d’abord dans le Magasin d’éducation et de récréation en deux parties : Les Anglais au Pôle Nord (publié du 20 mars 1864 au 20 février 1865) et Le Désert de glace (du 5 mars au 5 décembre 1865) avant d’être édité en volume (26 novembre 1866) sous le titre Voyages et aventures du Capitaine Hatteras. Il s’agit en réalité du premier titre à porter l’appellation « Voyages extraordinaires », Cinq Semaines en ballon, qui quant à lui entre dans la série « Voyages dans les mondes connus et inconnus », ne le prenant que dans ses rééditions à partir de 1866.
Hatteras est suivi dès novembre 1864 par la publication de Voyage au centre de la Terre (édition originale in-18 le 25 novembre 1864, puis en grand in-octavo le 13 mai 1867). Ces trois premiers romans de Jules Verne sont d’immenses succès. Il peut ainsi abandonner la bourse et déménage à Auteuil au 39, rue La Fontaine dans un logement beaucoup plus vaste où le couple peut recevoir.
En 1865, il devient membre de la Société de géographie. Il publie dans le Bulletin de la Société divers textes dont Histoire de la guerre civile américaine (1861-1865) (1868), un rapport sur l’ouvrage de Louis Cortambert et F. de Tranaltos ou Les Méridiens et le calendrier (janvier-juin 1873.
Il décide de louer en août 1865 une maison au Crotoy. Il s’installe alors dans une dépendance de la propriété Millevoye. Il est en pleine rédaction de sa Géographie illustrée de la France et de ses colonies ainsi que de Vingt Mille Lieues sous les mers. Honorine, Suzanne, Valentine et Michel peuvent ainsi profiter des bains de mer. En mars 1866, il loue à la propriété même un appartement pour l’été puis, au printemps 1868, une petite villa de deux étages, La Solitude. Il se fait alors construire un bateau, le Saint-Michel, une chaloupe de pêche aménagée pour la plaisance. Les plans du bateaux sont établis par le marin Paul Bos (1826-1886).
En mars 1869, il s’installe à l’année dans La Solitude et y vit effectivement à partir d’avril 1869.
Le 16 mars 1867, en compagnie de son frère Paul, il embarque sur le Great Eastern à Liverpool pour les États-Unis. Il tirera de sa traversée le roman Une ville flottante (1870).
Le 8 mars 1868, il fonde avec Victor Massé, Léo Delibes, Auguste Lelarge, Fournier-Sarlovèze, Bazille, Bertall, Charles Béchenel et Aristide Hignard0 le Club des « Onze-sans-femmes », un dîner hebdomadaire d’autres célibataires sans métiers définis qui peut aussi se comprendre par « Onze sans les femmes » comme l’écrit William Butcher : « Il faudrait sans doute réinterpréter les mots « sans femmes », puisque nombre des invités, Verne compris, sont mariés à cette époque ».
En juillet 1871 il s’installe à Amiens. Il écrit alors à son ami Charles Wallut : « Sur le désir de ma femme, je me fixe à Amiens, ville sage, policée, d’humeur égale, la société y est cordiale et lettrée. On est près de Paris, assez pour en avoir le reflet, sans le bruit insupportable et l’agitation stérile. Et pour tout dire, mon Saint-Michel reste amarré au Crotoy. ».
Son père, Pierre Verne, meurt d’une attaque le 3 novembre 1871, à Nantes. Il se rend aux obsèques puis regagne Amiens et se plonge dans l’écriture du Tour du monde en 80 jours. Il fréquente la bibliothèque de la Société industrielle où il peut se documenter grâce à son important fonds de revues scientifiques et le 8 mars 1872, devient membre titulaire de l’Académie des sciences, des lettres et des arts d’Amiens, « à l’unanimité des suffrages ». Contrairement à l’usage, il ne fait alors pas un discours de réception mais lit un passage de son futur roman à paraître Le Tour du monde en 80 jours. En 1875, il en est élu directeur ainsi qu’en 1881 et, à cette occasion, il prononce plusieurs discours de réception, notamment en 1875, pour un de ses amis, le caricaturiste Gédéon Baril, qui signera en 1881 les illustrations de Dix Heures en chasse chez Hetzel, nouvelle que Jules Verne a auparavant lue le 18 décembre 1881, en séance publique à l’Académie d’Amiens et qu’Hetzel reprend à la suite du Rayon vert, dans un texte remanié.
Dès juin 1867, l’Académie française couronne le Magasin d’Éducation et de Récréation (Jules Verne, P.-J. Stahl, Jean Macé) par le Prix Montyon. Il recevra le même prix, à titre individuel, en 1872 pour l’ensemble Cinq Semaines en ballon, Voyage au centre de la Terre, Vingt Mille Lieues sous les mers, De la Terre à la Lune et Autour de la Lune et lors de la séance de l’Académie française du 8 août 1872, ce sont tous les ouvrages de Jules Verne dans leur ensemble parus chez Hetzel en dehors du Magasin d’Éducation qui sont couronnés. À cette occasion, M. Patin, secrétaire perpétuel de l’Académie, fait l’éloge de Jules Verne : « Les merveilles usées de la féerie y sont remplacées par un merveilleux nouveau, dont les notions récentes de la science font les frais ».
En 1869, Hetzel pousse Jules Verne a entrer à l’Académie française. Celui-ci lui répond : « Qui n’a pas une grande fortune ou une grande situation politique n’a point de chance d’y arriver ! ». Malgré tout, en mars 1876, Jules Verne fait une première démarche pour postuler. Il écrit à Hetzel : « Je vous rappelle, pour mémoire, que voilà deux places vacantes à l’Académie. Vous m’avez un peu mis l’eau à la bouche. Vous avez beaucoup d’amis dans l’illustre corps. Suis-je arrivé à la situation voulue pour resupporter… un échec honorable ». En vain. En 1883, il tente de nouveau sa chance par l’intermédiaire d’Alexandre Dumas fils, en espérant ainsi les voix de Victorien Sardou, d’Eugène Labiche et de Maxime Du Camp mais il sait qu’il a deux redoutables concurrents : Alphonse Daudet et Edmond About. C’est ce dernier qui sera élu. Après un nouvel échec en 1884, en 1892, alors qu’une place est de nouveau libre, Jules Verne remarque que depuis sa première candidature, ce sont pas moins de trente-sept académiciens qui sont morts et qu’à aucun moment son nom n’a été sérieusement retenu. Il écrit : « Le grand regret de ma vie est que je n’ai jamais compté dans la littérature française ».
Du 6 novembre au 22 décembre 1872 parait, dans Le Temps, Le Tour du monde en quatre-vingts jours repris la même année en volume par Hetzel.
Jules Verne, membre du Yacht Club de France depuis le 4 février 1874, dont il est aussi membre honoraire, fait construire le Saint-Michel II par l’architecte Abel Le Marchand le 15 janvier 1876. Celui-ci est mis à l’eau trois mois plus tard, le 25 avril 1876. Il s’agit d’un cotre de plaisance sur les plans d’une « hirondelle de la Manche ». Jules Verne a sillonné la Manche et l’Atlantique pendant 18 mois, avant d’acquérir son successeur à l’été 1877.
La même année, il obtient de la justice que son fils mineur Michel, au comportement rebelle, soit placé pour six mois dans une maison de redressement, la colonie pénitentiaire de Mettray.
À la fin avril 1877, Honorine Verne, qui organisait tous les mercredis soir des réunions de jeux et de salon, est victime d’abondantes métrorragies qui manquent la faire mourir. Elle est sauvée par une transfusion de sang, cas rarissime à l’époque mais sera de nouveau reprise en décembre 1879. Elle ne peut ainsi être présente au bal costumé que Jules Verne a organisé, sur le thème du Voyage à la Lune, pour introduire son fils et ses belles-filles dans la bonne société amiénoise. Les invitations ont été lancées le lundi de Pâques 2 avril 1877. Y est présent, entre autres personnalités, et parmi plus de sept cents invités, son ami Nadar, le modèle de Michel Ardan, héros de ses romans De la Terre à la Lune et Autour de la Lune, déguisé en son personnage, sortant d’un obus qu’on avait roulé au milieu des quadrilles.
De juin à août 1878, Jules Verne navigue de Lisbonne à Alger sur le Saint-Michel III, puis, en juillet 1879, en Écosse et en Irlande. Troisième croisière en juin 1881, avec son frère, son neveu Gaston et Robert Godefroy : il visite la mer du Nord, la Hollande, l’Allemagne, puis, par le canal de l’Eider, Kiel et la Baltique jusqu’à Copenhague. Paul Verne écrit le récit de ce dernier voyage qui est publié en 1881 chez Hetzel sous le titre De Rotterdam à Copenhague, à la suite de La Jangada, dans une version revue, à la demande de l’éditeur, par Jules Verne.
Embarqué de force pour un voyage aux Indes pendant l’été 1879, Michel Verne est mis à la porte par son père en décembre 1879 mais continue de vivre à Amiens où son père lui verse une pension.
En 1882, Jules Verne déménage du 44, boulevard Longueville, où il réside depuis 1873, pour emménager au 2, rue Charles-Dubois, la fameuse maison à la tour surmontée d’un belvédère, qui présente des similitudes frappantes avec les maisons à tour dans deux de ses romans posthumes, Le Secret de Wilhelm Storitz et La Chasse au météore. Le 8 mars 1885, il donnera un second bal dans sa nouvelle demeure, bal auquel sa femme peut, cette fois, assister.
Il décide en 1884 de faire une grande croisière autour de la Méditerranée. Le Saint-Michel III dont le port d’attache était Le Tréport, quitte Nantes le 13 mai. À son bord, se trouvent Paul Verne, Robert Godefroy, Edgar Raoul-Duval, Michel Verne, Louis-Jules Hetzel et son neveu Maurice (1862-1947), fils de Paul, qui prend des notes. Il compte retrouver sa femme, en visite chez sa fille Valentine et son gendre, en Algérie. Le navire arrive à Vigo le 18, à Lisbonne le 23. Verne passe à Gibraltar le 25 mai. À son arrivée à Oran, il retrouve Honorine et est reçu par la Société de géographie de la ville. Les journaux lui consacrent de nombreux articles. Le 10 juin, il est à Bône où le bey de Tunis met à sa disposition un wagon spécial. Retrouvant son navire, il essuie une tempête près de Malte, visite la Sicile, Syracuse, puis Naples et Pompéi. À Anzio, le groupe prend le train pour Rome. Le 7 juillet, Verne est reçu en audience privée par Léon XIII. Curieusement, le lendemain, il rend visite à la loge maçonnique de la ville. Puis il rencontre Louis-Salvador de Habsbourg-Lorraine, avec lequel il établit une relation épistolaire qui durera jusqu’à la mort de l’écrivain. Deux mois après le départ du navire, Verne est de retour à Amiens. Il s’inspire de ce voyage dans la rédaction de Mathias Sandorf qui sera publié dans Le Temps du 16 juin au 20 septembre 1885.
Le 15 février 1885, il se décide à vendre le Saint-Michel III. L’entretien du yacht devient dispendieux, son fils s’endette et lui coûte cher. Il le cède, à moitié prix, au courtier maritime Martial Noë en juillet 1885. Contrairement à ce que de nombreux biographes ont écrit, il ne vend donc évidemment pas le Saint-Michel à cause de l’attentat dont il est victime le 9 mars 1886.
En effet, à cette date, alors qu’il rentre du Cercle de l’Union vers cinq heures, il trouve, après avoir ouvert sa porte de fer, son neveu Gaston armé d’un revolver. Celui-ci tire sur l’écrivain qu’il atteint à la jambe. Gaston, arrêté, est suspecté de folie. Son père, Paul Verne, déclarera que son fils a tiré sur Jules Verne pour attirer l’attention sur celui-ci afin de le faire entrer à l’Académie française. Gaston Verne restera interné jusqu’à sa mort, le 13 février 1938. Robert Godefroy envoie un télégramme à la maison Hetzel. Mais Louis-Jules Hetzel est à Monte-Carlo, au chevet de son père qui s’éteint le 17 mars. La blessure de Jules Verne dont la balle ne pourra jamais être extraite, lui laissera une légère claudication jusqu’à la fin de sa vie.
Le 15 février 1887, sa mère, Sophie Verne, meurt, il ne peut se rendre aux obsèques, car il marche difficilement et sa guérison n’avance pas. Il revient cependant une dernière fois à Nantes dans le courant de cette même année, afin de régler les problèmes de succession et vendre la maison de campagne de es parents sise rue des Réformes à Chantenay.
Contraint de se sédentariser, il reporte son intérêt vers la vie de la cité. Le 6 mai 1888, Jules Verne est élu au conseil municipal d’Amiens sur la liste républicaine (gauche modérée) conduite par Frédéric Petit. Il écrit à son ami Charles Wallut : « Mon unique intention est de me rendre utile et de faire aboutir certaines réformes urbaines. ». Il y siégera jusqu’en 1904 et s’y occupera essentiellement des commissions concernant l’instruction, le musée, le théâtre, la culture en général et l’urbanisme.
En 1890, il devient un membre très actif de l’Alliance française.
En 1902, il sent ses forces intellectuelles diminuer. À une demande du directeur de l’Académie d’Amiens, il répond : « Vous me demandez d’écrire quelque chose pour l’Académie. Oubliez-vous donc qu’à mon âge les mots s’en vont et les idées ne viennent plus. »
Il n’écrit pratiquement plus mais confie à Robert H. Sherard qu’il a beaucoup d’avance et que ce n’est pas si grave qu’il doive travailler lentement. En effet, dès 1892, Verne tient une liste des romans écrits et les corrige au fur et à mesure de leur parution. Malgré tout, il accepte la présidence du Groupe espérantophone d’Amiens. Ardent défenseur de cette toute jeune langue internationale, il promet à ses amis d’écrire un roman où il décrira les mérites de l’espéranto. Il commence la rédaction de Voyage d’études vers la fin de l’année. Mais, épuisé, il pose sa plume au bout de six chapitres : lorsqu’il entama la rédaction de ce roman en juillet 1903 sur la base d’une trame détaillée, Jules Verne avait en effet situé l’action au Congo. La presse, à la suite d’Edmund Dene Morel, se faisant l’écho en juillet et août 1903 de graves exactions contre les populations indigènes, Jules Verne suspend sa rédaction. Le brouillon sera repris par son fils Michel, mais l’œuvre finale (L’Étonnante Aventure de la mission Barsac) ne fera pas allusion à l’espéranto.
Le diabète, qui attaque son acuité visuelle, l’anéantit petit à petit. Après une sévère atteinte vers la fin de 1904, une nouvelle crise le terrasse, le 17 mars de l’année suivante. Jules Verne s’éteint le 24 mars 1905 à Amiens, dans sa maison du 44 boulevard Longueville (aujourd’hui boulevard Jules Verne). Ses obsèques, célébrées à l’église Saint-Martin d’Amiens, attirent une foule de plus de cinq mille personnes. Plusieurs discours sont prononcés, notamment celui de Charles Lemire pour la Société de géographie. L’empereur Guillaume II envoie le chargé d’affaires de l’ambassade d’Allemagne présenter ses condoléances à la famille et suivre le cortège. Ce jour-là, aucun délégué du gouvernement français n’était présent aux funérailles. L’écrivain est inhumé au cimetière de la Madeleine à Amiens. Sa tombe en marbre est réalisée en 1907 par le sculpteur Albert Roze. Intitulée « Vers l’Immortalité et l’Éternelle Jeunesse », elle représente l’écrivain (ou l’allégorie de son œuvre) soulevant la pierre brisée de sa sépulture en écartant le linceul qui le drape, le bras tendu vers le ciel. La tombe est vraisemblablement inspirée par la lettre d’Achille Moullart (1830-1899), directeur de l’Académie d’Amiens, qui lors de la réception de Jules Verne à l’ Académie avait écrit : « Un grand peuple est tombé au dernier degré de l’abaissement, et à quelque temps de là, quand ses ennemis et ses envieux chantaient un de profundis ironique sur la tombe où ils le croyaient enseveli, on l’a vu soulever peu à peu la pierre, sortir de son linceul et apparaître plus vivant et plus fort ».
Honorine Verne rejoint son mari, cinq ans après, le 29 janvier 1910.
Source : Wikipédia.