Jules Michelet, né le 21 août 1798 à Paris et mort le 9 février 1874 à Hyères, est un historien français.
Libéral et anticlérical, il est considéré comme étant l’un des grands historiens du XIXe siècle bien qu’aujourd’hui controversé, notamment pour avoir donné naissance à travers ses ouvrages historiques à une grande partie du « roman national », républicain et partisan, remis en cause par le développement historiographique de la fin du XXe siècle. Il a également écrit différents essais et ouvrages de mœurs dont certains lui valent des ennuis avec l’Église et le pouvoir politique. Parmi ses œuvres les plus célèbres de l’époque, Histoire de France, qui sera suivie d’Histoire de la Révolution.
Après avoir fait des suppléances au lycée Charlemagne, il est nommé professeur d’histoire au Collège Sainte-Barbe-Rollin à Paris le 13 novembre 1822. Cette période est des plus favorables pour les érudits et les hommes de lettres en France (tels qu’Honoré de Balzac, présent lui aussi dans ce lycée dont les résultats sont toutefois moins favorables que les siens) et Michelet a de puissants appuis en Abel-François Villemain et Victor Cousin, entre autres. Bien qu’il ait des idées politiques fermes que lui a transmises son père – un
républicanisme fervent teinté de romantisme libre-penseur –, il est d’abord et avant tout un homme de lettres et un enquêteur sur l’histoire du passé. Il appartient à cette école qui pense que l’histoire doit être avant tout un cours d’enseignement philosophique, et ses premiers ouvrages sont des manuels scolaires destinés, en premier lieu, à ses élèves. Il publie tout d’abord Tableau chronologique de l’histoire moderne de 1453 à 1739 en 1825, puis Tableaux synchroniques de l’histoire moderne de 1453 à 1648 en 1826. Son ouvrage suivant, Précis d’histoire moderne, publié en 1827, est un livre solide et soigné, meilleur que tout ce qui est paru auparavant, écrit dans un style sobre et néanmoins captivant. Le 3 février de la même année, il est nommé maître de conférences de philosophie et d’histoire à l’École préparatoire, future École normale supérieure.
Michelet semble avoir un goût presque exclusif pour l’œuvre des philosophes des Lumières : Locke (sa thèse latine), Condorcet, David Hume. Mais au-delà de l’évidente filiation intellectuelle qui le relie aux lumières (Voltaire et Montesquieu étaient parmi ses favoris), d’autres philosophes l’ont profondément inspiré, et tout particulièrement Leibniz.
Bien que Lucien Febvre lui ait donné un rôle populiste et progressiste, Jules Michelet est resté assez réfractaire sur son siècle. Il affirme dans son Histoire du XIXe siècle un pessimisme convaincu, proche d’autres historiens de la IIIe République, comme Taine et Ernest Renan. « Notre siècle par ses grandes machines (l’usine et la caserne) attelant les masses à l’aveugle, a progressé dans la fatalité […] Au fatalisme de 1815 et d’Hegel succède le fatalisme médical, physiologique […] Socialisme, militarisme et industrialisme ». Il s’opposera à tous les monismes socialistes à propos de l’histoire de la Révolution française. Dans Le Banquet, il reproche aux socialistes de s’abandonner à la religion en les suspectant d’ultra-cléricalisme.
Il fut le premier représentant de l’historicisme en France, théorie philosophique qui pense que les connaissances, les courants de pensée ou les valeurs d’une société sont liés au contexte historique de cette société. Dans une citation fameuse, il définit l’histoire comme une « résurrection ».
Dans Quelques-uns parmi les meilleurs il traitait des sciences naturelles, sujet nouveau pour lui, auquel on dit que sa femme l’avait amené. Le premier d’entre eux était Les Femmes de la révolution, esquisses détachées de sa grande histoire (1854), où la faculté naturelle et inimitable de Michelet pour le dithyrambe laisse trop souvent la place à l’argumentation ennuyeuse et peu concluante qui fait penser à une prédication[non neutre]. Dans le suivant, L’Oiseau (1856), il se découvrait une veine nouvelle et très réussie. Ce sujet de l’histoire naturelle ne fut pas traité du point de vue de la science tout court, ni de celui du sentiment, ni de l’anecdote ou des commérages, mais de celui du panthéisme démocratique fervent de l’auteur.
Michelet restait fidèle à son système d’études psychologiques. Comme historien, il cherchait l’âme des faits ; dans ces ouvrages il rechercha l’âme de l’insecte et de l’oiseau. Taine écrivit : « L’auteur ne sort pas de sa carrière ; il l’élargit. Il avait plaidé pour les petits, pour les simples, pour le peuple. Il plaide pour les bêtes et les oiseaux. »
Ces œuvres remarquables, mi-pamphlets, mi-traités moraux, se succédèrent de façon ininterrompue pendant cinq ou six ans, à douze mois d’intervalle généralement. L’Amour (1858), un des livres les plus populaires de l’auteur fut suivi par La Femme (1860), un livre sur lequel, selon l’Encyclopædia Britannica, on pourrait fonder une critique entière de la littérature et du caractère français, et où Michelet ne fit que distinguer le plaisir sensuel de la passion amoureuse et de l’union de deux cœurs.
À l’homme réconcilié avec les animaux (L’Oiseau et L’Insecte), puis avec lui-même (L’Amour et La Femme), il ne restait plus qu’à apprendre l’amour de la création. Tels furent les buts de La Mer (1861) et de La Montagne, publié quelques années plus tard.
Dans un autre genre paraît en 1862 La Sorcière – qui connaît un « succès de scandale » et fait l’objet de nombre d’interprétations psychologiques et littéraires -, il porte au plus haut degré toutes les étrangetés de l’auteur. C’est un cauchemar et rien de plus, mais un cauchemar de la plus extraordinaire vraisemblance et puissamment poétique[non neutre]. La Sorcière est développé notamment à partir de l’Histoire de l’Inquisition en France, un ouvrage paru en 1829 qui s’est avéré une des nombreuses forgeries de Lamothe-Langon, prétendant se baser sur des documents inédits des archives ecclésiastiques du diocèse de Toulouse et mettant en scène un procès en sorcellerie médiéval. Les travaux des historiens Norman Cohn et Richard Kieckhefer dans les années 1970 ont démontré que cet ouvrage constitue l’une des plus grandes falsifications de l’histoire, car ces archives n’ont jamais existé pas plus que n’existe de chasse aux sorcières au Moyen Âge, ce phénomène ne débutant pas avant le XVIe siècle. Les travaux de Michelet ont été régulièrement repris par des historiens et auteurs postérieurs qui, sans examiner la véracité des sources prétendues par Lamothe-Langon, ont répercuté la forgerie au point que les procès de sorcières imaginés par celui-ci sont devenus un standard de l’historiographie de la « chasse aux sorcières ». En outre, Michelet y accrédite la légende du droit de cuissage, bien qu’on n’ait jamais trouvé la trace d’une telle pratique dans le droit positif français ni dans aucune archive.
Cette série, dont chaque élément était en même temps une œuvre d’imagination et de recherche, n’était pas encore terminée, que les derniers volumes révélèrent un certain relâchement. L’ambitieuse Bible de l’humanité (1864), une ébauche historique des religions, a tout sauf peu de valeur. Dans La Montagne (1868), le dernier de sa série d’histoire naturelle, les effets de style du genre staccato sont poussés plus loin même que ceux de Victor Hugo. Nos fils (1869), le dernier de la suite des petits livres publiés durant la vie de l’auteur, est un traité de l’éducation, fidèle à l’Émile de Jean-Jacques Rousseau, écrit avec une grande connaissance des faits et avec les habituelles largeur et profondeur de vue de Michelet, et cela malgré des capacités d’expression déclinantes.
On retrouve ses pleines capacités dans un livre posthume, Le Banquet, publié en 1878. L’image des populations industrieuses et affamées de la côte ligure est (qu’elle soit vraie ou non) une des meilleures choses qu’ait faites Michelet. Pour compléter cette liste d’ouvrages de tous les genres, on peut mentionner deux volumes d’extraits ou d’abrégés, écrits et publiés à différentes occasions : Les Soldats de la révolution et Légendes démocratiques du Nord, où il expose l’héroïsme des peuples européens pour gagner leur liberté.
La publication de cette série de livres, et l’achèvement de son Histoire, occupèrent Michelet durant les deux décennies du Second Empire. Il vécut en partie en France, en partie en Italie, et avait l’habitude de passer l’hiver sur la Côte d’Azur, surtout à Hyères. Enfin, en 1867, la grande œuvre de sa vie fut achevée. Dans l’édition habituelle elle occupe dix-neuf volumes. Le premier de ceux-ci traite de l’histoire ancienne jusqu’à la mort de Charlemagne, le second de l’époque qui vit l’apogée de la France féodale, le troisième du XIIIe siècle, le quatrième, le cinquième et le sixième de la guerre de Cent Ans, le septième et le huitième de l’établissement du pouvoir rural sous Charles VII et Louis XI. Le XVIe et le XVIIe siècle sont traités chacun en quatre volumes, dont une grande partie n’est liée que de façon lointaine à l’histoire de France proprement dite, surtout dans les deux volumes intitulés Renaissance et Réforme. Les trois derniers volumes continuent l’histoire du XVIIIe siècle jusqu’au déclenchement de la Révolution.
L’hostilité sans compromis de Michelet envers le Second Empire n’empêcha pas que sa chute et les désastres qui l’accompagnèrent le stimulassent encore une fois pour le pousser à agir. Non seulement il écrivit des lettres et des pamphlets durant la guerre, mais lorsqu’elle fut achevée il entreprit de compléter par une Histoire du XIXe siècle la gigantesque tâche qu’il s’était assignée et que ses deux grandes histoires avaient déjà presque terminée. Concernant sa carrière publique, la nouvelle république ne lui rendit pas entièrement justice, refusant de lui redonner son professorat au Collège de France, dont il prétendait n’avoir jamais été légalement privé.
Les Origines du droit français, cherchées dans les symboles et les formules du droit universel de Michelet furent éditées par Émile Faguet en 1890 et la seconde édition parut en 1900.
Source : Wikipédia.