Juan d’Autriche, commandant militaire.

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L’infant don Juan d’Autriche, né le 24 février 1545 ou 15471 à Ratisbonne (Allemagne) et mort le 1er octobre 1578 à Bouge, près de Namur (Belgique), est un prince espagnol de la famille des Habsbourg – fils illégitime de Charles Quint – qui fait une carrière militaire dans les armées de son demi-frère Philippe II et est gouverneur des Pays-Bas de 1576 à 1578. Il est notamment le commandant de la flotte européenne à la célèbre bataille de Lépante, victoire navale décisive des puissances chrétiennes regroupées en une Sainte Ligue contre l’Empire ottoman.


Fruit de la relation illégitime de Charles Quint et de Barbara Blomberg, une femme issue d’une famille de notables de Ratisbonne, en 1547, don Juan d’Autriche est baptisé, en réalité, sous le prénom de Jérôme (Jerónimo ou Jeromín). En 1550, l’empereur charge un de ses proches, son majordome Luis Méndez Quijada, de l’éducation du jeune garçon. Pendant cette période, Quijada est tenu de faire croire que l’enfant est son propre bâtard. Il est élevé en Castille, dans la ville – proche de Madrid – de Leganés, dans la rue qui porte actuellement son nom (Jeromín), puis à Villagarcía de Campos à côté de Valladolid et enfin à Cuacos de Yuste.

Il ne connaît son père qu’à l’âge de neuf ans, lorsque celui-ci le fait venir en 1556 – après son abdication – au monastère de Yuste (Estrémadure), où il s’est retiré. L’empereur avait déjà inséré, en 1554, un codicille à son testament, demandant à son fils légitime, Philippe II, de recevoir le jeune bâtard comme son propre frère de sang. L’empereur et roi meurt en 1558. Philippe II, respectant la volonté de leur père, le reconnaît comme membre de la famille royale et lui attribue le nom de « don Juan d’Autriche », avec les honneurs et les revenus dignes de son rang (1559). Don Juan est en outre doté d’une maison en 1562, c’est-à-dire d’une suite de familiers et de domestiques chargés de sa vie quotidienne. Luis Quijada, son ancien tuteur, en est désigné comme gouverneur. Il ne reçoit cependant ni titre, ni terre, ni le prédicat d’altesse. Il n’est donc que son excellence Don Juan d’Autriche, ce qui le met davantage au rang d’un Grand d’Espagne que d’un infant. Il vit son adolescence à la cour d’Espagne avec son demi-frère Philippe II. Il fait ses études à la prestigieuse université d’Alcalá de Henares, mais refuse de se consacrer à la carrière ecclésiastique à laquelle on l’avait destiné.

En 1566, son frère lui octroie un des cinq colliers de l’ordre de la Toison d’or que le chapitre général avait laissé à sa disposition en 1559.

Juan d’Autriche, carte maximum, Belgique, 1978.

Ayant manifesté son désir de faire une carrière militaire, il est nommé par le roi au commandement d’une escadre chargée de combattre les pirates barbaresques en Méditerranée (1568). Il démontre dans cette expédition de réelles capacités militaires, aussi est-il chargé, l’année suivante, de diriger la répression de la révolte des morisques, ces descendants des musulmans du royaume de Grenade – restés en Espagne après la fin de la Reconquête en 1492 – convertis officiellement au catholicisme, mais qui continuaient à pratiquer leur religion (1569). Ce soulèvement – commencé en 1567 – contre la violation des droits qui avaient été accordés à l’époque aux morisques – encore appelé guerre des Alpujarras – dure quatre ans et se termine par leur défaite devant don Juan d’Autriche.

Ces succès lui permettent aussi d’obtenir – ce qui est le sommet de sa carrière militaire – le commandement suprême de la flotte de la Sainte Ligue formée par l’Espagne, Venise et le pape Pie V contre les Turcs (1570). Face à la stratégie défensive que préconisent ses conseillers plus prudents, don Juan d’Autriche impose son choix d’aller à la rencontre de la flotte turque d’Ali Pacha et de la vaincre, ce qu’il fait à la bataille de Lépante (7 octobre 1571). Lors de cette expédition il a sous ses ordres, parmi les soldats, un certain Miguel de Cervantès – le futur auteur de Don Quichotte – qui y perd l’usage de la main gauche, ce qui lui vaudra plus tard le surnom de « manchot de Lépante ». Cette victoire vaut à Don Juan de recevoir du pape, en 1576, la rose d’or, d’abord réservée exclusivement au préfet de Rome, puis, plus tard offerte à un fidèle catholique qui avait rendu un service important à l’Église.

Le retentissant succès de Lépante accroît les ambitions de don Juan d’Autriche. Philippe II a prudemment rejeté les plans de son demi-frère, qui proposait de profiter de la situation pour se lancer dans une grande expansion territoriale en Méditerranée, ainsi que ses demandes d’être officiellement reconnu comme infant, avec traitement d’altesse. Peut-être est-ce pour mettre fin à ces ambitions que le roi l’envoie comme gouverneur aux Pays-Bas (1576), poste extrêmement difficile dans lequel ont déjà échoué le duc d’Albe et Luís de Zúñiga y Requesens, incapables de mettre fin à la rébellion protestante. Pour convaincre son demi-frère d’accepter ce poste périlleux, où Don Juan va remplacer le gouverneur Requesens, mort au siège de Zierikzee, Philippe II insinue la possibilité de lui confier plus tard le commandement d’une invasion de l’Angleterre destinée à placer sur le trône britannique une reine catholique, Marie Stuart.

Pour gagner son poste à Bruxelles, Don Juan n’hésite pas à traverser une France hostile, déguisé en valet d’Octavio Gonzague, frère du prince d’Amalfi, un des deux hommes qui l’accompagnent. Pour ne pas être reconnu, il se noircit le visage et se frise les cheveux à la manière des Maures. Une fois dans la ville de Luxembourg, il se dépouille de ce personnage et déclare qu’il est envoyé par le Roi pour gouverner les Pays-Bas. Mais, arrivé à Marche-en-Famenne, il est empêché d’aller plus loin par la présence des forces des États généraux.

Très rapidement, Don Juan comprend le caractère irréaliste des projets du roi d’Espagne Philippe II. À son arrivée, il trouve toutes les provinces rassemblées, sinon contre le pouvoir, du moins contre les armées espagnoles qui ravagent le pays. Profitant de la vacance du pouvoir entraînée par la mort du gouverneur Requesens, les États généraux ont pris l’initiative de se réunir et de proclamer la pacification de Gand. Cet acte, d’abord accepté par le nouveau gouverneur, est rapidement remis en cause par le noyau dur des orangistes qui prennent alors le nom de « Patriots ». Réunis à Bruxelles, ils concluent l’Union de Bruxelles, établissant les modalités pratiques de la pacification de Gand. Il s’agit de suspendre les édits du roi d’Espagne, de rendre les biens spoliés aux rebelles et d’établir la liberté religieuse en Zélande et en Hollande, exigences incompatibles avec celles du roi d’Espagne.

Don Juan d’Autriche croit pourtant qu’il peut parvenir à amadouer ses adversaires en offrant un compromis, l’Édit perpétuel de Marche-en-Famenne de (1577) par lequel il offre de retirer les forces espagnoles et de respecter les libertés dans les dix-sept provinces. Pour le reste, Don Juan continue à maintenir les exigences fondamentales de la couronne d’Espagne, en vertu desquelles les rebelles sont sommés de reconnaître la foi catholique, ainsi que la souveraineté espagnole, tout en renonçant au protestantisme. Mais ces exigences sont rejetées par le duc d’Orange et les États généraux des Dix-Sept Provinces. La continuation de la guerre devient donc inévitable.

Après une entrée triomphale à Bruxelles (1er mai), le prince d’Orange orchestre une campagne d’hostilité contre Don Juan qui a licencié les troupes à la solde du Roi et en particulier les Tercios espagnols. Se sentant en danger, Don Juan décide de se retirer dans la citadelle de Namur. À l’abri dans cette forteresse, il peut facilement faire entrer les troupes étrangères.

À Namur, II vient d’abord au devant de la sœur du roi de France, Marguerite de Valois, reine de Navarre (La Reine Margot) qui se rend aux eaux de Spa (si toutefois ce voyage ne cachait pas quelque dessein plus important).

Guillaume d’Orange prit prétexte de l’occupation de la citadelle de Namur pour proclamer que l’édit de Marche-en-Famenne était rompu et entraîna les États généraux dans la voie de la révolution ouverte au nom du droit supérieur des gens du commun à la participation au gouvernement. Pour la seconde fois, il crut le moment venu de réaliser son programme : ” Vers l’Union par la Tolérance “.

D’autre part, les intrigues qu’organise Antonio Pérez à la Cour placent Don Juan dans une situation délicate envers le roi. Les ressources dont il a besoin (tant en hommes qu’en argent) arrivent avec parcimonie. Mais si la monarchie espagnole se montre insuffisante dans l’emploi des moyens matériels, elle croit pouvoir l’emporter sur le plan diplomatique et Philippe II charge Don Juan d’établir des contacts avec la France, les Anglais et les factions rebelles en vue de régler la situation insurrectionnelle, tâche bien trop grande pour le piètre diplomate qu’il est.

Le 31 janvier 1578, Don Juan bat l’armée des États généraux lors de la bataille de Gembloux, près de Namur, imposant notamment le catholicisme dans les Pays-Bas du sud comme seule religion autorisée.

Le 31 mars 1578, son secrétaire et plus proche collaborateur, Juan de Escobedo, est assassiné à la suite des menées d’Antonio Pérez, secrétaire de Philippe II, qui a obtenu l’autorisation de cet assassinat pour raison d’État, en accusant Juan Escobedo de complot avec les révoltés.

Don Juan meurt du typhus, maladie contractée au cours d’une campagne militaire, le 1er octobre 1578, sur les hauteurs de Bouge.

Lors des funérailles, l’ordre de préséance est imposé par Alexandre Farnèse. Le corps de Don Juan est porté par quatre seigneurs (Pierre-Ernest, comte de Mansfeld, maréchal de camp général, Octavio Gonzague, général de cavalerie, Pierre de Tolède, marquis de Ville-Franche et Jean de Croÿ, comte de Rœulx) du camp de Bouge jusqu’à la cathédrale Saint-Aubain de Namur entre, d’une part, la cavalerie et, d’autre part, l’infanterie rangée en ordre de bataille.

Don Juan est revêtu de ses armes (armure complète), de son collier de la Toison d’or et dix-sept bagues lui ornent les doigts, qui sont ensuite glissés dans des gantelets. Selon la coutume que l’on observait dans les funérailles des princes de la Maison de Bourgogne, une couronne de drap d’or ornée de pierreries ceint la tête du défunt.

Le corps est déposé ainsi paré à la cathédrale Saint-Aubain de Namur, où il reste un an, le temps que Philippe II accède à la requête que le défunt a exprimée avant de mourir, c’est-à-dire de transférer son corps à l’Escurial, près de Madrid, pour reposer aux côtés de son père, Charles Quint. Pour faciliter le convoi, on démembre le cadavre et on fait passer les ossements par la France, dans trois coffrets. Arrivés en Espagne, on fiche les os sur des tiges de métal avant de les revêtir de l’armure et des signes du commandement. Le corps ainsi mis est exposé debout quelques jours à Burgos avant d’être finalement placé dans un cercueil et transféré en grande pompe à l’Escurial. Après une nouvelle cérémonie funèbre, il est placé dans une crypte qui lui est consacrée, à part du panthéon des souverains et de la salle des infants.

Le tombeau de Don Juan se compose d’un gisant plus grand que nature reposant sur une vasque de marbre blanc. Le prince est figuré en armure, portant les fameuses bagues aux mains, fermées sur une épée de bronze. Le gisant, œuvre du sculpteur Giuseppe Galeotti, date du XVIIIe siècle.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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