Johann Gottlieb Fichte, philosophe.

Johann Gottlieb Fichte (19 mai 1762, Rammenau en Lusace – 27 janvier 1814, Berlin) est un philosophe allemand du XIXe siècle. Il fut un des fondateurs du mouvement philosophique connu sous le nom d’idéalisme allemand, qui tira son origine des écrits théoriques et éthiques d’Emmanuel Kant.


Johann Gottlieb Fichte est né dans l’Électorat de Saxe, à Rammenau en 1762. Il est le premier des huit enfants de Christian Fichte, né en 1737 et décédé en 1812, et de Dorothea, née Schurich, née en 1739 et décédée en 1813. Fichte est issu d’un milieu très modeste. Son père, simple mercier et fabricant de rubans, ne pouvait lui assurer une éducation, et il fut lui-même gardien d’oies jusqu’à l’âge de 12 ans. Lorsque le duc Ernst Haubold von Miltitz (apparenté à la famille du poète-philosophe Novalis) visite Rammenau et manque le sermon du pasteur local, il est orienté vers le jeune Fichte, qui lui en récite l’intégralité par cœur.

Impressionné, le duc von Miltitz prend l’éducation du jeune garçon en charge. Il l’envoie d’abord auprès du curé Gotthold Leberecht Krebe, puis à l’école de Meissen, et en 1774, Fichte entre à la prestigieuse École régionale de Pforta proche de Naumburg, où il eut des aventures tumultueuses.

À partir de 1780, Fichte commença des études de théologie à Iéna, puis Leipzig, afin de devenir pasteur ; il découvre alors la philosophie avec Spinoza. En 1788, il se fait finalement précepteur à Zurich, où il rencontre Johanna Rahn (1755-1819), une nièce de Klopstock, qu’il épouse en 1793. Il découvre la philosophie de Kant en 1790 lors de son préceptorat, à la demande de son élève, qui lui demande des explications sur la Critique kantienne. Il étudie alors l’intégralité de son œuvre critique avec une rigueur et une ferveur inégalée à l’époque.

Son caractère difficile et rebelle fait de lui un précepteur malheureux, et après un premier changement de Zurich à Varsovie, il abandonne sa charge en 1792 et se décide à partir pour Königsberg, rencontrer enfin ce Kant dont il se dit subjugué. Non reçu à sa première tentative, il rédige son premier ouvrage en 4 semaines pour convaincre le maître de le voir : Essai d’une critique de toute révélation (1792). Kant accepte alors de le recevoir, et, faveur exceptionnelle (car Fichte avait besoin d’argent et a d’ailleurs demandé à Kant un prêt que ce dernier a refusé), le recommande à son éditeur. Publié anonymement par erreur de l’éditeur, l’essai est si pénétré de la pensée de Kant, que le public l’assimile à ce dernier et croit lire une quatrième Critique. C’est Kant lui-même qui lève le doute et ouvre la scène philosophique à Fichte en lui en rendant la paternité.

En 1793, Fichte est nommé Professeur de philosophie à Iéna, où il succède à Karl Leonhard Reinhold, qui était lui aussi un disciple important de Kant et une source d’influence pour Fichte. Ce dernier suscite très vite un enthousiasme considérable par son éloquence, par la fulgurance et la nouveauté de ses idées, mais aussi par le caractère en apparence énigmatique, voire hermétique de sa pensée. La publication, par feuillets, de la Grundlage der gesamten Wissenschaftslehre (selon les traductions : les Principes de la Doctrine de la science ou bien l’Assise fondamentale de la Doctrine de la science en son entièreté), en 1794-95, lui assure une renommée dans toute l’Allemagne et même en dehors (Madame de Staël le fait connaître en France).

Ce texte est la seule version de la Doctrine de la science qui est publiée par Fichte de son vivant. Il ne la renie jamais, mais remet sans cesse la Doctrine de la science sur le métier. Seuls ses disciples en profitent, du moins avant la publication des premières éditions critiques de ses œuvres après sa mort. D’un niveau d’abstraction incroyable, d’une difficulté maintes fois soulignée tant par les disciples que par les détracteurs de Fichte, de son vivant même, cette première œuvre spéculative marque déjà l’écart qui sépare Fichte de son maître Kant (lequel se désolidarise officiellement de la pensée fichtéenne en 1799), en dépit des affirmations de Fichte lui-même, qui prétend transformer la lettre du transcendantalisme pour mieux en conserver l’esprit. Elle est en tout cas considérée comme la première œuvre de l’idéalisme allemand.

Fichte est très vite soucieux de systématicité. Pour cette raison, mais aussi dans la mesure où il est guidé par les idéaux émancipateurs de la Révolution, il cherche, dès le début, à tenir ensemble et à développer aussi bien une philosophie première (continuellement réécrite et renouvelée jusqu’à sa mort) qu’une philosophie appliquée (une philosophie du droit, de l’État, de l’éthique, de l’économie, de l’éducation, etc.), et même une philosophie dite « populaire », plus immédiatement militante. Hanté par la question de l’altérité, il est à certains égards le fondateur de la philosophie de l’éducation moderne, et le premier philosophe postkantien à proposer un système conjuguant avec autant de puissance théorique que de souci pragmatique une pensée de l’action politique et une réflexion spéculative et conceptuelle. Tandis que ses cours prodigués à Iéna deviennent célèbres, il écrit :

  • Conférences sur la destination du savant, 1794
    en 1794, Leçons sur la destination du savant (all. Über die Bestimmung des Gelehrten) ;
  • en 1796, Fondements du Droit naturel (deuxième partie du livre publiée en 1797) (all. Grundlage des Naturrechts) ;
  • en 1798, Système d’éthique (all. System der Sittenlehre).

Parallèlement, il développe sa philosophie première dont il propose une nouvelle version, alors seulement enseignée et non publiée : la Wissenschaftslehre Nova Methodo, dont il existe aujourd’hui des versions tirées de cahiers de cours de certains auditeurs de Fichte. En 1798, on propose à Fichte un poste dans un nouveau type d’école centrale à Mayence sous le patronage de la République française. Fichte esquisse alors le projet d’un institut pédagogique purement scientifique mais il ne donne pas suite à cette invitation.

En 1799 a lieu le célèbre Atheismusstreit (Querelle de l’athéisme). Fichte est accusé d’athéisme et férocement critiqué par des personnalités qui, en réalité, guettaient toutes les occasions d’évincer Fichte (parfois surnommé le « Robespierre allemand » par ses adversaires) de la vie intellectuelle allemande, ou au moins de diminuer son influence politique en raison de sa complaisance avec la Révolution française et de son orientation démocratique. Au cœur de la tourmente, Fichte rédige un Appel au public contre l’accusation d’athéisme. Il choisit de démissionner et de quitter la ville d’Iéna. Il ne retrouve plus jamais la gloire de ses premières années d’activité. Après son départ, en effet, c’est le jeune Schelling qui attire tous les regards à l’Université d’Iéna. De plus, les attaques de nature strictement philosophique se multiplient aussi : tandis que ses disciples, notamment la jeune génération romantique mais aussi le jeune Schelling et le jeune Hegel (qui s’opposent par la suite à son système), soulignent le caractère révolutionnaire de sa pensée, les recensions critiques de ses textes pleuvent, accusant l’opacité ou l’hermétisme de cette pensée. Fichte n’y voit qu’une somme de malentendus et en souffre considérablement.

Il publie en 1800 L’État commercial fermé, un traité d’économie politique qui influença Karl Marx, dont la recherche récente a découvert et souligné l’influence du Fichte militant sur la pensée. Il écrit une nouvelle version de sa philosophie fondamentale : la Wissenschaftslehre 1801-02, uniquement enseignée.

Entre 1804 et 1805, Fichte, qui a retrouvé une chaire universitaire, expose quatre fois, à Berlin puis à Erlangen, sa Doctrine de la science. Elle y atteint des sommets métaphysiques, mais elle est professée devant un public de disciples toujours plus restreint. Il y développe une nouvelle explication de sa philosophie (tout en restant fidèle à ses principes généraux), couramment appelée la Bildlehre (ou doctrine de l’image), qui prend une inflexion fort néoplatonicienne. Avec Le Caractère de l’époque actuelle, ses Discours à la nation allemande rencontrent à nouveau le succès et font brièvement resurgir sa figure auprès du public allemand, dans le contexte des guerres napoléoniennes.

Il enseigne à Berlin où il devient en 1811 Recteur de l’université. Son caractère inflexible et sa dureté lui attirèrent certains ennuis dans cette fonction, notamment avec Schleiermacher. Alors Recteur, il est le premier à interdire le duel à mort dans l’Université allemande.

Il remanie encore sa Doctrine de l’État, son éthique et sa philosophie juridique, tout en poussant dans ses ultimes accomplissements la Doctrine de la science (exposée encore et à chaque fois reprise depuis le début en 1807, 1810, 1811, 1812, 1813 et 1814). Mais elle n’existe plus que pour un cercle de disciples désormais confidentiel, dans l’ombre, non plus seulement de Schelling, mais aussi de Hegel. Car la Phénoménologie de l’Esprit, publiée par Hegel en 1807, éclipse toutes les autres figures de l’idéalisme allemand. Schelling et Hegel, d’ailleurs, ne suivent délibérément plus l’évolution de la pensée de Fichte depuis le tournant du siècle.

Sa dernière Doctrine de la science est interrompue en 1814 par sa mort, alors qu’il est tombé dans l’oubli, au cours d’une épidémie de typhus.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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