Joan Miró, peintre, sculpteur et graveur.

Joan Miró, né à Barcelone le 20 avril 1893 et mort à Palma de Majorque le 25 décembre 1983, est un peintre, sculpteur, graveur et céramiste espagnol. Se définissant avant tout comme « Catalan international », il est l’un des principaux représentants du mouvement surréaliste.

Son œuvre reflète son attrait pour le subconscient, pour l’« esprit enfantin » et pour son pays. À ses débuts, il montre de fortes influences fauvistes, cubistes et expressionnistes, avant d’évoluer dans de la peinture plane avec un certain côté naïf. Le tableau intitulé La Ferme, peint en 1921, est l’une des toiles les plus connues de cette époque.

Suivant son départ pour Paris, son œuvre devient plus onirique, ce qui correspond aux grandes lignes du mouvement surréaliste auquel il adhère4. Dans de nombreux entretiens et écrits des années 1930, Miró manifeste son désir d’abandonner les méthodes conventionnelles de la peinture, pour — selon ses propres mots — « les tuer, les assassiner ou les violer », favorisant ainsi une forme d’expression contemporaine. Il ne veut se plier à aucune exigence, ni à celles de l’esthétique et de ses méthodes, ni à celles du surréalisme.

En son honneur, la Fondation Joan-Miró a été créée à Barcelone, en 1975. C’est un centre culturel et artistique, dévolu à la présentation des nouvelles tendances de l’art contemporain. Elle est initialement alimentée par un important fonds offert par le maître. D’autres lieux possèdent d’importantes collections d’œuvres de Miró, comme la Fondation Pilar et Joan Miró de Palma de Majorque, le Musée national d’art moderne de Paris, le musée d’art moderne de Lille et le Museum of Modern Art de New York.


Les Galeries Dalmau de Barcelone accueillent la première exposition individuelle de Joan Miró, du 16 février au 3 mars 1918. Le peintre catalan est exposé parmi d’autres artistes d’influences diverses. L’exposition regroupe 74 œuvres, paysages, natures mortes et portraits. Ses premières peintures dénotent une influence claire de la tendance postimpressionniste française, du fauvisme et du cubisme. Les toiles de 1917, Ciurana, le village et Ciurana, l’église, montrent une proximité avec les couleurs de Van Gogh et les paysages de Cézanne, le tout renforcé par une palette sombre.

L’une des toiles de cette époque qui attire le plus l’attention est Nord-Sud, du nom d’une revue française de 1917, dans laquelle Pierre Reverdy écrit à propos du cubisme. Dans cette œuvre, Miró mêle des traits de Cézanne avec des symboles peints à la façon des cubistes, Juan Gris et Pablo Picasso. La toile Portrait de V. Nubiola annonce la fusion du cubisme avec d’agressives couleurs fauves. Durant ce même printemps 1917, Miró expose au Cercle artistique de Saint-Luc avec les membres du Groupe Courbet.

Miró entreprend en 1919 son premier voyage à Paris. Ce n’est alors qu’un simple séjour, mais le peintre se fixe durablement dans la capitale française au début des années 1920b. Après avoir logé quelque temps à l’hôtel Namur, rue Delambre, puis dans un meublé de la rue Berthollet, le sculpteur Pablo Gargallo l’aide à trouver un atelier au 45, rue Blomet, où il peut déposer ses tableaux.

Juan Miro, carte maximum, Paris, 14/09/1974.

En 1922, Jean Dubuffet lui laisse son appartement rue Gay-Lussac. Au 45, rue Blomet, Miró rencontre des peintres et des écrivains qui deviennent ses amis : André Masson, Max Jacob, Antonin Artaud. Ce lieu devient un creuset effervescent où s’élaborent un nouveau langage et une nouvelle sensibilité. Miró y retrouve Michel Leiris et Armand Salacrou. L’atelier est situé à quelques centaines de mètres de la rue du Château, où habitent Yves Tanguy, Marcel Duhamel et Jacques Prévert. Les deux groupes se rencontrent souvent et nouent des amitiés chaleureuses. La plupart d’entre eux rejoindront le surréalisme. « La rue Blomet, c’est un lieu, un moment décisif pour moi. J’y ai découvert tout ce que je suis, tout ce que je deviendrai. C’était le trait d’union entre le Montmartre des surréalistes, et les “attardés” de la rive gauche. »

Miró ne retourne en Espagne que durant les périodes estivales. Il rencontre des membres du mouvement Dada et retrouve Picasso qu’il avait connu à Barcelone. Il se lie d’amitié avec les poètes Pierre Reverdy, Max Jacob et Tristan Tzara. En 1921 a lieu sa première exposition parisienne à la galerie La Licorne (organisé par Josep Dalmau), préfacée par Maurice Raynal. Avec cette exposition s’achève sa période dite « réaliste ».

De 1921 à 1922, Miró travaille sur La Ferme, qui est l’œuvre principale de cette époque dite « détailliste ». Commencé à Mont-roig et achevé à Paris, ce tableau contient en germe toutes les possibilités que le peintre reprend par la suite en les infléchissant vers le fantastique. C’est une œuvre de base, une œuvre clé, synthèse de toute une période18. La relation mythique maintenue par le maître avec la terre est résumée par cette toile qui représente la ferme de sa famille de Mont-roig. Il sépare le graphisme au caractère ingénu et réaliste des objets, les animaux domestiques, les plantes avec lesquelles l’être humain travaille et les objets quotidiens de l’homme. Tout est étudié dans le moindre détail, dans ce qu’on appelle la « calligraphie mirónienne », et qui est le point de départ du surréalisme de Miró dans les années suivantes. Les dernières œuvres de sa période « réaliste » sont terminées dès 1923 : Intérieur (La Fermière), Fleurs et papillon, La Lampe à carbure, L’Épi de blé, Grill et lampe à carbure.

Une fois La Ferme achevée, l’auteur décide de la vendre pour des motifs économiques. Léonce Rosenberg, qui s’occupe des toiles de Pablo Picasso, accepte de la prendre en dépôt. Après quelque temps, et devant l’insistance de Miró, le galeriste propose au peintre de partager l’œuvre en toiles plus petites afin d’en faciliter la commercialisation. Miró, furieux, récupère la peinture à son atelier avant de la confier à Jacques Viot de la galerie Pierre. Celui-ci la vend à l’écrivain américain Ernest Hemingway, pour 5 000 francs.

À Paris, en 1924, l’artiste rencontre des poètes surréalistes, dont Louis Aragon, André Breton, Paul Éluard, Philippe Soupault, animateurs de la revue Littérature et créateurs, en 1924, du surréalisme. Miró est cordialement introduit dans le groupe. Breton définit le surréalisme par rapport à la peinture comme « une vacance totale, une crise absolue du modèle ». Le modèle ancien, pris dans le monde extérieur n’est plus et ne peut plus être. Celui qui va lui succéder, pris dans le monde intérieur, n’est pas encore découvert.

À cette époque, Miró vit une crise personnelle. La réalité extérieure ne l’inspire plus. Il doit maintenant lutter contre le réalisme, la tradition, la convention, l’académisme et le cubisme, et se frayer un chemin personnel au-delà de Duchamp et de Picabia, pour inventer un langage nouveau. La présence d’amis sûrs et engagés dans la même aventure que lui hâte la rupture décisive qu’il est en train de provoquer. Miró signe à leurs côtés le Manifeste du surréalisme. André Breton affirme ainsi que Miró est « le plus surréaliste d’entre nous ».

Durant cette période, le maître abandonne son style détailliste. Il travaille à la synthèse des éléments magiques déjà présents dans ses travaux antérieurs. Pendant l’été 1924, il affine sa schématisation des formes, avec notamment le Paysage catalan (également titré : Le Chasseur), où sa peinture devient de plus en plus géométrique. On y retrouve des formes simples : le disque, le cône, l’équerre et le triangle. Il réduit l’objet à une ligne qui peut être droite, courbe ou pointillée. Son « lyrisme spontané de la ligne vivante, avec une progressive intrusion dans le merveilleux », aboutit ainsi à l’idéogramme dans un espace irréaliste et à ces « tableaux à déchiffrer », à partir desquels Miró aborde la série « que par commodité nous appellerons “les fonds gris” », et dont Pastorale, La Lampe espagnole, Portrait de Mademoiselle K, La Famille, et Portrait d’une danseuse espagnole, font partie.

En 1967, Miró produit La Montre du temps, œuvre créée à partir d’une couche de carton et d’une cuillère, fondus en un bronze et unis dans un ensemble qui constitue un objet sculpté mesurant l’intensité du vent.

À la suite de la première grande exposition du maître à Barcelone en 1968, plusieurs personnalités de l’art appuient la création dans la ville d’un centre de référence de l’œuvre de Miró. En accord avec la volonté de l’artiste, la nouvelle institution devrait promouvoir la diffusion de toutes les facettes de l’art contemporain. Alors que le régime franquiste ferme le panorama artistique et culturel de la ville, la Fondation Miró apporte une vision nouvelle. Le bâtiment est construit selon un concept éloigné des notions de musées généralement admises à cette époque, il cherche à promouvoir l’art contemporain plutôt qu’à se dédier à sa conservation. L’ouverture a lieu le 10 juin 1975. Les bâtiments sont de Josep Lluís Sert, disciple de Le Corbusier, complice et ami des grands artistes contemporains, avec lesquels il a déjà collaboré (Fernand Léger, Alexander Calder, Pablo Picasso). Le fond initial de la fondation 5 000 pièces vient de Miró et de sa famille.

« Le peintre n’a pas voulu rester à l’écart de la construction de sa fondation, ni se limiter à des donations […] Il tenait à participer concrètement, par une œuvre de peintre, au travail collectif des architectes, des maçons, des jardiniers […] Il choisit pour ce faire le lieu le plus retiré : le plafond de l’auditorium, où sa peinture pourrait donner une racine vivante à l’édifice. » Cette grande peinture de 4,70 × 6 m, exécutée sur panneau d’aggloméré, sera terminée et signée le 11 mai 1975.

Du 9 juin au 27 septembre 1969, Miró expose ses gravures à Genève dans « Œuvres gravées et lithographiées » à la galerie Gérald Cramer. Cette même année a lieu une grande rétrospective de ses œuvres graphiques au Norton Simon Museum (Californie).

Il construit en collaboration avec Josep Llorens la Déesse de la mer, une grande sculpture de céramique qu’ils immergent à Juan-les-Pins. En 1972, Miró expose ses sculptures au Walker Art Center de Minneapolis, au Cleveland Museum of Art et à l’Institut d’art de Chicago. À partir de 1965, il produit une grande quantité de sculptures pour la Fondation Maeght, à Saint-Paul-de-Vence. Les œuvres les plus notables sont Oiseau de lune, Lézard, Déesse, Fourchette et Femme aux cheveux emmêlés.

En 1974, les Galeries nationales du Grand Palais, à Paris, organisent une grande exposition rétrospective pour son 80e anniversaire, alors que l’année suivante, la Fondation Miró est construite par Luis Sert à Montjuïc, sur les hauteurs de Barcelone. Elle conserve une importante collection de ses œuvres.

Le pianiste Georges Cziffra rachète les ruines de la collégiale Saint-Frambourg de Senlis, en 1973, afin accueillir sa fondation créée l’année suivante. De nouveaux vitraux sont installés en 1977 ; huit d’entre eux sont confiés par le pianiste à son ami Joan Miró. Le peintre les dessine et leur réalisation est confiée au maître-verrier de Reims, Charles Marcq. Le peintre commente à cette occasion :

« J’ai pensé toute ma vie à faire des vitraux, mais l’occasion ne s’était jamais présentée. Cela m’a passionné. Cette discipline que la chapelle m’a dictée m’a entraîné à avoir une très grande liberté, m’a poussé à faire quelque chose de très libre en approchant cette virginité. On trouve très souvent des étoiles dans mon œuvre parce que je me promène souvent en pleine nuit, je rêve de ciels étoilés et de constellations, cela m’impressionne et cette échelle de l’évasion qui est très souvent mise en valeur dans mon œuvre représente une envolée vers l’infini, vers le ciel en quittant la terre. »

En 1980, il reçoit la Médaille d’or du mérite des beaux-arts par le ministère de la Culture.

En avril 1981, Miró inaugure à Chicago une sculpture monumentale de 12 mètres, connue sous le nom de Miss Chicago ; le 6 novembre, deux autres bronzes sont installés dans la ville de Palma de Majorque. L’année suivante, la ville de Houston dévoile Personnage et oiseau.

En 1983, en collaboration avec Joan Gardy Artigas, l’artiste réalise Femme et oiseau, sa dernière sculpture, qui est destinée à la ville de Barcelone. Elle est faite de béton et couverte de céramique. L’état de santé chancelant de Miró l’empêche de participer à la cérémonie d’inauguration. Située dans le parc Joan-Miró de Barcelone près d’un étang artificiel, l’œuvre de 22 mètres de haut représente une forme oblongue, surmontée d’un cylindre évidé et d’une demi-lune. L’extérieur est couvert de céramique dans les tons les plus classiques de l’artiste : le rouge, le jaune, le vert et le bleu. Les céramiques forment des mosaïques.

Joan Miró meurt à Palma de Majorque, le 25 décembre 1983, à l’âge de 90 ans, et est enterré au cimetière de Montjuïc de Barcelone.

La même année, Nuremberg organise la première exposition posthume de Miró puis, en 1990, la Fondation Maeght de Saint-Paul de Vence dévoile elle aussi une rétrospective intitulée « Miró ». En 1993, enfin, la Fondation Miró de Barcelone fait de même, pour le centenaire de sa naissance.

En 2018, le Grand Palais à Paris organise une rétrospective réunissant 150 œuvres, traçant l’évolution de l’artiste sur 70 années de création.

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Sources : Wikipédia, YouTube.