Gaspard Monge, Comte de Péluse, mathématicien et homme politique.

Gaspard Monge, comte de Péluse, né le 9 mai 1746 à Beaune et mort le 28 juillet 1818 à Paris (ancien 10e arrondissement), est un mathématicien et homme politique français.

Son œuvre considérable mêle géométrie descriptive, analyse infinitésimale et géométrie analytique.

Il concourt également avec Berthollet, Chaptal et Laplace à la création de l’École d’arts et métiers.

Il est également membre de la commission des sciences et des arts lors de la campagne d’Italie (1796–1797), et chargé de mission dans l’expédition d’Égypte (1798–1799).

Monge étudie au collège des oratoriens de Beaune avec ses deux frères : Louis, qui participe brièvement (du 1er au 30 août 1785) à l’expédition de La Pérouse, et Jean. Il y reçoit de la part des religieux une

éducation libérale, puisqu’en plus des humanités, il est instruit en histoire, sciences naturelles et mathématiques. Il montre dès lors les premiers signes de son excellence, au point que le directeur le qualifie de « puer aureus » (enfant d’or). À l’âge de quatorze ans, il construit une pompe à incendie, dont les effets suscitent l’admiration. De 1762 à 1764 il part terminer ses études au collège de la Trinité de Lyon, où il donne aussi un cours de sciences physiques.

Revenu à Beaune, Monge dessine un plan de la ville qui lui vaut d’être remarqué par le lieutenant-colonel Merveilleux du Vignaux de l’École royale du génie de Mézières où il est bientôt engagé comme dessinateur en 1765. Il y fait la connaissance de Charles Bossut, le professeur de mathématiques de l’École, avec qui il peut discuter de ses idées sur la géométrie. Cependant il ne peut pas devenir officier du génie puisqu’il n’est pas de famille noble. Un an après son arrivée, on lui confie la réalisation de plans de fortifications. En 1766, Bossut le choisit comme répétiteur de mathématiques, chargé de suppléer ses cours. Monge fait entrer la géométrie descriptive dans l’enseignement de l’école. C’est dans le cadre de l’École royale du génie qu’il devient membre de la franc-maçonnerie, initié à la loge L’union parfaite du corps royal du génie de cette école militaire.

À travers la correspondance que Monge entretient avec diverses personnalités liées aux mathématiques — tel que Alexandre-Théophile Vandermonde —, on voit qu’il approfondit sa connaissance de la géométrie analytique et de la géométrie différentielle dès 1768, année d’élection de Bossut à l’Académie des sciences. C’est à cette époque qu’il prend connaissance de l’œuvre du Suisse Leonhard Euler et du Français d’origine turinoise Joseph-Louis Lagrange. Il cherche alors à étendre à l’espace le calcul des variations que ces mathématiciens avaient développé pour le plan.

L’année suivante, Monge entre en contact avec d’Alembert et surtout Condorcet. À l’invitation de d’Alembert, de Bossut et de Vandermonde, entre 1771 et 1772, il rédige six mémoires. Il en présente la plupart à l’Académie des sciences de Paris et à celle de Turin. À cette époque, il établit les principes qui vont guider ses recherches sur la géométrie différentielle, sur plusieurs types de surfaces dans l’espace, sur des équations différentielles et sur le calcul intégral. À partir de 1771, il devient aussi professeur de physique à l’École de Mézières. Il y développe son intérêt pour d’autres domaines de la science, tels que la géologie, la météorologie et la chimie. En avril 1772, il devient le correspondant de l’Académie des sciences de Paris, grâce aux rapports favorables de d’Alembert, Bossut et Vandermonde.

Au printemps de 1774, Gaspard Monge rencontre un puissant protecteur, le marquis de Castries. Il commence à nouer une très longue amitié avec le fils du concierge de ce dernier, Jean-Nicolas Pache.

Gaspard Monge, épreuve d’artiste.

Le 14 janvier 1780, Monge est élu membre de l’Académie des sciences de Paris, en tant que géomètre-adjoint, en remplacement de Vandermonde. Cette nomination l’oblige à résider à Paris au moins cinq mois par an pour pouvoir assister aux sessions. L’abbé Bossut fait en sorte que Monge puisse conserver son poste d’enseignant à l’École royale du Génie de Mézières. Pendant ses mois d’absence, il sera remplacé par son frère Louis, mathématicien. D’autre part, Bossut lui demande de l’assister dans ses cours d’hydrodynamique qu’il donne à l’Académie des sciences, au Louvre.

En octobre 1783, le maréchal de Castries, ministre de la Marine, choisit Gaspard Monge comme examinateur des gardes-marine, pour remplacer Étienne Bezout décédé. Cette nomination représente un tournant considérable dans sa vie professionnelle. Il doit renoncer à une nomination très probable à la chaire d’hydrodynamique à l’Académie des sciences et, de plus, abandonner définitivement l’École de Mézières. Il gardera cette charge d’examinateur des gardes-marine jusqu’au début de la révolution de 1789, mais n’abandonne pas ses activités scientifiques. Pendant plusieurs années,il alterne les voyages d’inspection dans les différents ports du pays hébergeant des écoles de la Marine, avec la rédaction de ses mémoires en mathématiques, physique et chimie.

Gaspard Monge, carte maximum, 1953.

Chaque année, à date fixe, Monge part organiser les examens à Alès et Vannes, plus tard à Brest, Rochefort et Toulon. Pour Monge, la façon dont se déroulent les examens n’est pas indifférente : ce n’est pas tant la masse de données mémorisées qui l’intéresse, que le raisonnement des élèves et leur capacité à appliquer ce qu’ils ont appris. Ce nouvel esprit se reflète dans son système d’évaluation, qui prend en compte divers aspects du candidat avant de conclure. Il note avant tout la façon dont le candidat a répondu aux différentes parties de l’examen — arithmétique, géométrie, trigonométrie rectiligne et sphérique, navigation —. Puis il évalue aussi bien son intelligence que son caractère. Enfin, il préserve la plus grande équité entre les candidats et se montre totalement insensible aux lettres de recommandation. Cette mission, aussi bien à Paris que dans les différents ports, lui permet d’entrer en contact avec une administration qu’il ne va pas tarder à avoir sous ses ordres en tant que ministre de la Marine. Au cours de ses voyages — chacun pouvait durer plus de trois mois — il visite les mines, les fonderies et tous les arsenaux les plus importants. Il approfondit sa connaissance des questions techniques qui se révéleront cruciales au moment de la Révolution française.

En 1784, le maréchal de Castries lui demande de réécrire le cours élémentaire de mathématiques de Bézout considéré comme obsolète. À l’été 1786, Monge écrit un traité de statique qui doit former le premier volume d’un cours complet de mathématiques. Après avoir présenté le traité à l’Académie des sciences début 1787, il l’envoie au ministre en s’engageant à écrire le cours complet. Le Traité élémentaire de statique est publié en 1788, mais les autres traités restent à éditer. Cet ouvrage exerce une grande influence et est traduit en différentes langues, dont l’allemand, l’anglais et le russe.

La Révolution française, qu’il soutient dès 1789, change complètement le cours de sa vie, alors qu’il est un des scientifiques les plus importants de France. Vraisemblablement vers le mois de juin 1790, il adhère, comme beaucoup de ses collègues académiciens, à un premier club modéré, la société patriotique de 1789, située au Palais-Royal. Puis il entre à la Société patriotique de la section du Luxembourg avec ses amis Jean-Nicolas Pache, Alexandre-Théophile Vandermonde, Jean-Baptiste Meusnier et Jean-Henri Hassenfratz. Il devient finalement membre du Club des Jacobins.

Bicentenaire Monge Palais de la découverte, Paris 15/02/1947.

Pourtant, la Révolution ne l’empêche pas d’exercer ses fonctions d’examinateur ni de siéger à L’Académie des sciences, qui reçoit très vite la mission d’établir les bases d’un système de mesures unifié sur une base décimale. En août 1792, Monge est nommé ministre de la Marine, en tant que scientifique reconnu, partisan de la cause populaire et examinateur des gardes-marine. Après le début des activités de la Convention le 22 septembre 1792, il conserve son poste de ministre de la Marine dans la Première République naissante. Une de ses premières décisions est de limiter ses privilèges de ministre et de partager sa résidence de fonction de la rue Royale avec des officiers de marine. La Marine française est complètement désorganisée en raison de la fuite de nombreux cadres, l’insubordination dans les arsenaux et la difficulté de recrutement. Il doit aussi freiner la vague de démissions que beaucoup de fonctionnaires lui présentent et ne peut éviter le départ de nombreux officiers. En février 1793, il fait face, en tant que ministre de la Marine, à la déclaration de guerre à l’Angleterre. Le 10 avril 1793, il démissionne de son poste de ministre de la Marine, dépassé par les querelles politiques, et retourne à l’Académie des sciences, mais celle-ci est dissoute par la Convention en août de la même année. Il est l’un des promoteurs du calendrier révolutionnaire, avec Fabre d’Églantine.

Républicain convaincu, soutenant ardemment la Révolution, il continue de travailler sur des projets militaires ou encore sur une réforme du système éducatif. Depuis 1793, l’idée germe en France de fonder une école unique destinée à préparer les différentes catégories d’ingénieurs civils et militaires. Monge, aussi bien que l’ingénieur Jacques-Élie Lamblardie, directeur de l’École des ponts et chaussées, pensent qu’une même formation au sein de la même école permettra d’en finir avec les rivalités entre ingénieurs de différentes spécialités. Sur le rapport de Barère, par le décret du 11 mars 1794 de la Convention, il est nommé membre de la commission chargée de la création d’une commission des travaux publics, à laquelle revient la direction des ponts et chaussées, des bâtiments civils, des travaux maritimes et du génie militaire. Lazare Carnot — dit le « grand Carnot » — y participe. Un premier projet est refusé par le Comité de salut public, qui confie un dossier plus ambitieux de création d’une école centrale des travaux publics, ébauche de l’École polytechnique. Il aide Lamblardie, premier directeur de la nouvelle école, pour l’organisation et l’installation de l’école à l’hôtel de Lassay, à côté du palais Bourbon. De nombreux membres fondateurs de l’école appartiennent, comme lui, à la franc-maçonnerie. Ses idéaux sont ceux d’un homme de la Révolution, soucieux de l’indépendance du pays, qui cherche à donner toute son autonomie à l’industrie nationale. Selon lui, il faut orienter la jeunesse vers le savoir scientifique et la maîtrise de la technologie. Il estime que l’enseignement, tant scientifique que technique, est destiné aux couches les plus populaires et pas seulement aux classes privilégiées. À l’École polytechnique, il est aidé par Jean Nicolas Pierre Hachette pour l’enseignement de la géométrie descriptive et Étienne-Marie Barruel et Joseph Jacotot pour celui de la physique. Responsable de la stéréotomie, il rédige un cours accéléré de cette discipline. Il rédige aussi trois cours de météorologie et d’acoustique. L’une des branches de la science à laquelle il consacre le plus d’efforts est l’application de l’analyse à la géométrie. C’est de cette époque que datent les Feuilles d’analyse appliquée à la géométrie, qui constituent l’ébauche d’Application de l’analyse à la géométrie, publiée en 1795.

Alors que l’enseignement a déjà commencé à l’École polytechnique, une commission nommée par la Convention met en route l’organisation de l’École normale, destinée à former tous les professeurs des écoles secondaires du pays. Les professeurs sont choisis parmi les meilleurs scientifiques du moment, Lagrange et Laplace pour les mathématiques, Berthollet pour la chimie et Monge pour la géométrie descriptive. Mais l’école vit à peine cinq mois, ce qui empêche Monge de développer les applications de la géométrie descriptive à la représentation et à la conception des machines comme prévu.

Gaspard Monge, carte maximum, Beaune, 13/10/1990.

Après avoir été sollicité par Napoléon rêvant alors d’Amérique avant qu’il ne soit finalement contraint à l’exil, à la Restauration, Gaspard Monge est écarté. Il est exclu de l’Institut national des sciences et des arts de Paris. Une ordonnance royale du 13 avril 1816 licencie l’École polytechnique. Elle est ressuscitée le 17 janvier 1817 sous le nom d’École royale polytechnique.

Seuls quelques fidèles continuent de voir Gaspard Monge. Il est frappé de plusieurs attaques d’apoplexie et meurt le 28 juillet 1818 au 31 rue de Bellechasse à Paris. Ses obsèques ont lieu le 30 juillet en l’église Saint-Thomas d’Aquin à Paris, Aucun hommage officiel ne lui est rendu, mais de nombreux amis tels Berthollet, Laplace et Chaptal, ainsi que plusieurs ingénieurs qui avaient été ses élèves assistent à son enterrement. Le 2 août, les élèves de l’École polytechnique, passant outre aux interdictions, lui rendent un dernier hommage au cimetière du Père-Lachaise. Puis en 1989 il est inhumé dans le caveau VII du Panthéon de Paris.

Source : Wikipédia.