Francisco de Zurbarán, peintre.

Francisco de Zurbarán (1598–1664) est un peintre du Siècle d’or espagnol. Contemporain et ami de Diego Vélasquez, Zurbarán se distingue dans les peintures religieuses — où son art révèle une grande force visuelle et un profond mysticisme — et il devient un artiste emblématique de la Contre-Réforme1. D’abord très marqué par Le Caravage, son style austère et sombre évolue pour se rapprocher des maîtres maniéristes italiens. Ses représentations s’éloignent du réalisme de Vélasquez et ses compositions s’éclaircissent dans des tons plus acides.


Francisco de Zurbarán est baptisé le 7 novembre 1598 à Fuente de Cantos (Badajoz). Deux autres grands peintres du Siècle d’or espagnol naîtront peu après : Diego Vélasquez (1599–1660) et Alonzo Cano (1601–1667).

Zurbaran, carte maximum, Espagne, 1962.

À quatorze ans, Zurbarán est placé en apprentissage à Séville, dans l’atelier du peintre Pedro Diaz de Villanueva (1564-1654), où Alonso Cano le rejoindra en 1616. Son apprentissage se termine en 1617, année où il épouse Maria Páez. Il habite alors à Llerena (Estrémadure), où naissent ses enfants, Maria, Juan (qui deviendra peintre et mourra au cours de la grande peste de 1649) et Isabel Paula. Après le décès de sa femme, il se remarie vers 1625 avec Beatriz de Morales. Nous savons qu’il est déjà connu en 1622, puisque, par contrat, il s’engage à peindre un retable pour une église de sa ville natale.

En 1626, il signe devant notaire un nouveau contrat avec la communauté des Frères prêcheurs de l’Ordre dominicain de San Pablo de Real, à Séville : il doit exécuter vingt-et-un tableaux en huit mois. Et c’est en 1627 qu’il peint le Christ en croix, œuvre admirée à un point tel par ses contemporains que le Conseil Municipal de Séville lui propose de venir s’installer là-bas en 1629.

Dans ce tableau, l’impression de relief est saisissante. Le Christ est cloué sur une croix au bois mal équarri. Le linge blanc, lumineux, qui lui ceint la taille, avec son drapé savant et déjà baroque, contraste dramatiquement avec les muscles souples et bien formés du corps. Le visage fin s’incline sur l’épaule gauche. La souffrance semble dépassée et laisse place à un ultime songe de Résurrection, dernière pensée d’une vie promise dont le corps, non plus torturé mais déjà glorieux, se fait le signe.

Comme pour La Crucifixion de Vélasquez (peint vers 1630, plus raide et plus symétrique), les pieds sont ici cloués séparément. À cette époque, des ouvrages parfois monumentaux disputent des représentations de la Crucifixion et notamment du nombre de clous. Par exemple les Révélations de Sainte Brigitte, qui parlait de quatre clous. Par ailleurs, après les décrets tridentins, l’esprit de la Contre-Réforme s’oppose aux grandes mises en scène et oriente plutôt les artistes vers des représentations du Christ seul. Enfin, bien des théologiens soutiennent que le corps de Jésus et celui de Marie ne pouvaient être que parfaits. Zurbarán adopte ces leçons, et s’affirme à vingt-neuf ans comme un maître incontestable.

Se disant toujours pintor de imagineria (peintre d’images, de statues), Zurbarán signe un nouveau contrat en 1628 avec le couvent de Nuestra Señora de la Merced Calzada (Notre-Dame de la Merci Chaussée). Il vient alors s’installer à Séville avec sa famille et les membres de son atelier. C’est là qu’il peint Saint Sérapion, un des martyrs mercédaires, martyrisé en 1240 à Alger.

Les religieux mercédaires (appartenant à l’Ordre de Notre-Dame-de-la-Merci), en plus des vœux traditionnels, prononçaient un « vœu de rédemption ou de sang » qui les engageait à donner leur vie pour le rachat des esclaves chrétiens en danger de perdre leur foi en contrées musulmanes.

Zurbarán parvient à exprimer l’horreur sans représentation d’une seule goutte de sang. Ici, ce n’est plus le sommeil divin précédant la Résurrection. La bouche entrouverte ne laisse pas échapper un cri de douleur, elle signifie l’accablement paroxystique, elle dit dans un souffle, simplement et terriblement, que c’en est trop pour pouvoir continuer à vivre.

Le grand manteau blanc, presque en trompe-l’œil, occupe la plus grande partie du tableau. Si l’on retire l’emplacement du visage, le rapport entre la surface totale et celle de ce vaste espace blanc est exactement le Nombre d’or.

Se proclamant lui-même « maître peintre de cette cité de Séville », Zurbarán s’attire la jalousie de certains, dont Alonso Cano, à qui Zurbarán n’en voudra pas. Refusant de passer les examens qui lui donneraient droit au titre, il estime que son œuvre et la reconnaissance des grands a plus de valeur que celle de quelques membres plus ou moins aigris de la corporation des peintres. Il trouve ses commanditaires dans bien des familles nobles de mécènes andalous et les grands couvents qu’elles protègent, ainsi que pour les Jésuites.

En 1634, il effectue un voyage à Madrid. Ce séjour est déterminant dans l’évolution de sa peinture. Il retrouve son ami sévillan Diego Vélasquez, dont il médite les œuvres. Il peut également voir les œuvres de peintres italiens travaillant à la cour d’Espagne, comme Angelo Nardi et Guido Reni. Zurbarán, dès lors, renonce au ténébrisme de ses débuts ainsi qu’à ses velléités de caravagisme (dont on peut voir un exemple notamment dans les visages des adolescents dans la partie droite de l’Exposition du corps de saint Bonaventure). Ses ciels vont devenir plus clairs, les tons moins contrastés.

Doté du titre de « Peintre du Roi », il revient peindre à Llerena pour l’église Notre-Dame de la Grenade. Par dévotion personnelle à la Vierge Marie, il offre de travailler sans être payé. Les commandes deviennent de plus en plus nombreuses : Nuestra Señora de la Defensión, la Chartreuse (Cartuja) de Jerez de le Frontera, l’église San Roman de Séville.

À l’intérieur des terres, sur les rives du Guadalquivir, Séville est l’un des grands ports européens. La cité vit du commerce avec les Amériques. Les galions apportent l’or, et repartent avec les produits espagnols, et entre bien d’autres choses, des œuvres d’art. On sait qu’en 1638, Zurbarán réclame le paiement d’une somme qui lui est due à Lima.

Sa femme, Beatriz, meurt en 1639. C’est cette année-là qu’il peint Le Christ à Emmaüs (Musée des beaux-arts de Mexico), et Saint François en extase. En 1641, il se remarie avec Mariana de Quadros (femme de Juan), qui décède peu après.

En janvier 1643, le comte-duc d’Olivares, jusque-là ministre et favori de Philippe IV, est exilé. Il avait beaucoup favorisé les artistes andalous. Cette crise politique s’ajoute à un ralentissement de l’activité commerciale de Séville. Les commandes de tableaux vont donc baisser, mais Zurbarán est toujours apprécié.

En 1644, il épouse Leonor de Tordera. Elle a vingt-huit ans et Zurbarán quarante-six. Ils auront six enfants.

Depuis 1636 au moins, Zurbarán passait des contrats avec l’Amérique du Sud. En 1647, un couvent péruvien lui commande trente-huit peintures, dont vingt-quatre Vierges grandeur nature. Sur le marché américain, il met également en vente des tableaux profanes, ce qui compense la raréfaction de la clientèle andalouse — dont Murillo autre peintre sévillan (1618-1682) sera lui aussi victime, et qui explique le départ d’Alonso Cano pour Madrid.

Ces commandes sont importantes puisqu’on sait, par un contrat retrouvé, que Zurbarán a vendu à Buenos Aires « quinze vierges martyres, quinze rois et hommes célèbres, vingt-quatre saints et patriarches » (tous spécifiés en grandeur nature), et même neuf paysages hollandais. Zurbarán pouvait donc se permettre d’entretenir un atelier très important avec des apprentis et des assistants. Son fils Juan, connu pour être un bon peintre de bodegones (scènes de cuisine, de marché et natures mortes) travaille probablement pour son père. Une belle nature morte de Juan Zurbarán se trouve au musée de Kiev.

Au début des années 1650, Zurbarán effectue un nouveau voyage à Madrid. Il peint alors en sfumato, comme en témoignent l’admirable visage de la Vierge dans l’Annonciation (1638) du Musée de Grenoble et Le Christ portant sa Croix de 1653 (cathédrale d’Orléans).

En 1658, les quatre plus grands peintres de l’Andalousie, Zurbarán, Vélasquez, Alonso Cano et Murillo, se trouvent à Madrid. Zurbarán témoigne pour l’enquête qui aboutira à l’entrée de Vélasquez dans l’Ordre de Santiago. De cette époque datent Le Voile de Véronique (Valladolid, Musée National), Le Repos pendant la fuite en Égypte (Musée de Budapest) et Saint François à genoux avec une crâne (Madrid, collection Plácido Domingo). Son ami fidèle Vélasquez meurt en 1660.

Le 27 août 1664, Francisco de Zurbarán meurt à Madrid.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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