Fiodor Dostoïevski, romancier.

Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski est un écrivain russe, né à Moscou le 30 octobre 1821 (11 novembre 1821 dans le calendrier grégorien) et mort à Saint-Pétersbourg le 28 janvier 1881 (9 février 1881 dans le calendrier grégorien). Considéré comme l’un des plus grands romanciers russes, il a influencé de nombreux écrivains et philosophes.

Après une enfance difficile, il fréquente une école d’officiers et se lie avec les mouvements progressistes pétersbourgeois. Arrêté en avril 1849, il est condamné à mort. Après un simulacre d’exécution, il est finalement déporté dans un bagne de Sibérie pendant quatre ans. Redevenu sous-lieutenant, il démissionne de l’armée en 1859 et s’engage complètement dans l’écriture. Épileptique, joueur couvert de dettes et d’un caractère sombre, Dostoïevski fuit ses créanciers et mène une vie d’errance en Europe au cours de laquelle il abandonne toute foi dans le socialisme et devient un patriote convaincu de l’Empire russe.

Écrivain admiré après la publication de Crime et Châtiment (1866) et de L’Idiot (1869), l’auteur publie ensuite ses deux œuvres les plus abouties : Les Démons (1871) et Les Frères Karamazov (1880).

Les romans de Dostoïevski sont parfois qualifiés de « métaphysiques », tant la question angoissée du libre arbitre et de l’existence de Dieu est au cœur de sa réflexion, tout comme la figure du Christ. Ses œuvres ne sont pas des « romans à thèse », mais des romans où s’opposent de façon dialectique des points de vue différents avec des personnages qui se construisent eux-mêmes, au travers de leurs actes et de leurs interactions sociales. Dostoïevski chemine ainsi principalement sur différents thèmes de la nature humaine et de la condition humaine.


À 22 ans, pendant l’été 1844, il démissionne pour se consacrer à son premier roman, Les Pauvres Gens. Porté aux nues par le poète Nikolaï Nekrassov et l’influent critique Vissarion Belinski, le roman est publié en janvier 1846 et connaît un succès public certain. Dostoïevski se retrouve alors propulsé au rang de « nouveau Gogol » et se pavane dans les cercles mondains de Saint-Pétersbourg. Bientôt, l’élite commence à railler son manque de tenue, son air abattu. Ivan Tourgueniev publie une satire en vers, où il le qualifie de « chevalier à la triste figure » et d’« aimable fanfaron ». C’est lors d’une de ces soirées que l’écrivain connaît vraisemblablement une première crise d’épilepsie (non diagnostiquée comme telle). Sa disgrâce est accélérée par la publication de ses romans suivants, Le Double et La Logeuse, qui ne rencontrent pas le succès escompté.

Depuis décembre 1846 ou janvier 1847, il fréquente le Cercle fouriériste de Mikhaïl Petrachevski, un fonctionnaire au ministère des Affaires étrangères, qui combat l’absolutisme de Nicolas Ier. Il n’adhère pas à un système en particulier (ses opinions se seraient progressivement orientées vers un mysticisme slavophile), mais cherche à maintenir une présence dans les milieux intellectuels progressistes pétersbourgeois. Il ne fréquente pas ces cercles pour fomenter de réelles actions révolutionnaires, mais pour discuter d’idées nouvelles et surtout parler de l’avenir de la Russie. Cette même année, il fait sa première crise d’épilepsie, à 26 ans.

En avril 1849, les membres du Cercle de Petrachevski sont arrêtés ; Dostoïevski est emprisonné à la forteresse Pierre-et-Paul. L’empereur Nicolas Ier voit resurgir le spectre de l’insurrection décabriste, un complot qui s’était propagé dans l’armée et avait abouti à la sanglante émeute du 14 décembre 1825 (26 décembre 1825 dans le calendrier grégorien). Mikhaïl Dostoïevski est également brièvement arrêté. Après une instruction de plusieurs mois, un procès, une condamnation à mort et un simulacre d’exécution sur la place Semenovski le 22 décembre 1849, l’empereur graciant les prisonniers à l’instant même où ils allaient être fusillés, la condamnation à mort est commuée en exil de plusieurs années et la peine en déportation dans un bagne de Sibérie. Fiodor Dostoïevski voit sa peine commuée en quatre ans de travaux forcés, auxquels s’ajoute l’obligation de servir ensuite comme simple soldat. Leonid Grossman voit dans cet épisode tragique l’origine du revirement idéologique de Dostoïevski, constaté à plusieurs reprises à partir de son séjour au bagne d’Omsk.

Le condamné Dostoïevski est mis aux fers. Le convoi part pour la Sibérie le jour de Noël et passe par Tver, Nijni Novgorod, Kazan, Perm et enfin Tobolsk, où il arrive le 9 janvier 1850. Dostoïevski dissuade un de ses compagnons d’infortune de se suicider. À Tobolsk, les prisonniers reçoivent la visite de plusieurs épouses des décabristes condamnés en 1826 qui avaient accompagné leurs maris en exil. Nathalie Fonvizine remet à Dostoïevski une bible dont il ne se séparera jamais.

Le 23 janvier 1850, Dostoïevski arrive à Omsk (Souvenirs de la maison des morts). En sa qualité de noble, certaines punitions et certains mauvais traitements lui sont épargnés, ce qui lui vaut d’être détesté par les autres détenus. Les punitions corporelles lui sont épargnées sur l’intervention de M. de Grave, un officier d’origine française ; le médecin du camp le prend en sympathie et lui accorde des séjours à l’infirmerie.

Dans les baraquements, il partage sa vie avec des forçats de droit commun. Il écrit dans sa correspondance : « Je n’ai pas perdu mon temps : j’ai appris à bien connaître le peuple russe, comme peut-être peu le connaissent ». L’intellectuel de salon qu’il était commence alors son évolution : « J’étais coupable, j’en ai pleine conscience… J’ai été condamné légalement et en bonne justice… Ma longue expérience, pénible, douloureuse, m’a rendu ma lucidité… C’est ma croix, je l’ai méritée… Le bagne m’a beaucoup pris et beaucoup inculqué. » Il rencontre au bagne « les hommes les plus richement doués, les plus forts de tout notre peuple… », et se rapproche ainsi du « peuple russe » orthodoxe, rapprochement qui nourrira plus tard son slavophilisme.

Durant sa captivité, Dostoïevski tente d’obtenir qu’on lui épargne les fers. Ses vaines demandes déclenchent l’ironie à Pétersbourg, où l’on raille la faiblesse du « révolutionnaire » Dostoïevski demandant la grâce de l’empereur qu’il voulait abattre…

Cette période déterminante trouvera écho dans plusieurs passages importants de ses livres ultérieurs, dont l’épilogue de Crime et Châtiment.

Sa peine se termine le 23 janvier 1854 et il est affecté comme simple soldat dans un régiment de Semipalatinsk en Sibérie. Après deux mois de vie de caserne, Dostoïevski obtient le privilège rarissime de pouvoir habiter en ville. Il fréquente les notables locaux et y fait la connaissance d’un petit fonctionnaire, Alexandre Ivanovich Issaïev, et de sa jeune épouse poitrinaire, Maria Dimitrievna. Trompé par l’intérêt charitable et sans doute purement mondain que lui porte la jeune femme, qu’il prend aussitôt pour de l’amour, Dostoïevski tente de la faire quitter son mari et de l’épouser. Sa condition de banni ne joue pas en sa faveur. L’écrivain entreprend alors toutes sortes de démarches auprès de l’empereur en vue d’obtenir une grâce (la guerre de Crimée vient de commencer). Les milieux littéraires pétersbourgeois se moquent de l’obséquiosité du « révolutionnaire » Dostoïevski.

Cependant, la situation personnelle de Dostoïevski s’améliore grandement avec la nomination du baron Wrangel comme procureur de Semipalatinsk. Son ode sur le couronnement lui vaut d’être promu, le 1er octobre 1856, aspirant, premier grade d’officier. Les frasques d’Alexandre Ivanovich Issaïev ont conduit sa famille dans la pauvreté, et Dostoïevski cherche à leur venir en aide. Il parvient à faire nommer Alexandre Ivanovitch comme inspecteur des débits de boissons à mille kilomètres de Semipalatinsk. Mais la situation amoureuse de l’écrivain ne s’améliore pas malgré la mort de l’encombrant mari, car un autre homme lui dispute les faveurs de Maria Dimitrievna.

Après de nombreux atermoiements de sa « fiancée », Dostoïevski épouse enfin Maria Dmitrievna Issaïeva le 15 février 1857. En avril 1857, Dostoïevski est rétabli dans ses titres de noblesse et obtient à nouveau le droit de publier librement. Il recommence à écrire : les Souvenirs de la maison des morts, récit romancé de sa vie au bagne, puis un roman plus léger — car il redoute toujours la censure —, Le Bourg de Stépantchikovo et sa population.

En 1859, il obtient sa retraite comme sous-lieutenant et l’autorisation de rentrer vivre à Saint-Pétersbourg, sous la surveillance de la police secrète. Il renoue alors avec les libéraux et fonde avec son frère Mikhaïl une revue modérée et nationaliste, Le Temps, où paraît notamment Souvenirs de la maison des morts. Cette revue est interdite en 1863, car un article publié, à propos de l’insurrection polonaise, est jugé trop contestataire par la censure. Pour la remplacer, les deux frères fondent la revue L’Époque, mais qui rencontre moins de succès. L’arrivée au pouvoir du nouvel empereur Alexandre II en 1855 a amené de nombreuses réformes en Russie : ainsi, le servage est aboli en 1861. Malgré ces ouvertures politiques, on assiste assez vite à l’émergence de mouvements révolutionnaires violents, ce qui inquiète beaucoup Dostoïevski. Il commence déjà à polémiquer de plus en plus sévèrement avec les socialistes qui considèrent l’homme comme raisonnablement et « fondamentalement bon » et que la science le conduit obligatoirement vers la lumière. Dostoïevski raille sa « sainteté la chimie ».

Grâce à l’esprit pratique et à la volonté de son épouse, la situation du ménage s’améliore considérablement. Dostoïevski finit par renoncer au jeu. Son roman Les Démons est inspiré d’un fait divers tragique : l’assassinat par les siens d’un des membres du groupe révolutionnaire de Serge Netchaïev.

Son œuvre romanesque s’achève par Les Frères Karamazov, qu’il publie à l’âge de 59 ans. Cette œuvre incarne l’apogée de Dostoïevski. Le roman synthétise ses deux plus grands thèmes de réflexion : la force irrationnelle de la passion et l’existence de Dieu. Ce livre connaît un succès immense et assoit la place de Dostoïevski parmi les grands écrivains russes. En 1880, son Discours sur Pouchkine, où il évoque sa vision sur le rôle de la Russie dans le monde, fait de lui un héros national acclamé tant par la jeunesse, les femmes russes que par ses anciens ennemis (Ivan Tourgueniev au premier rang).

Ses dernières années restent marquées par des discours enflammés sur l’âme et le peuple russes ainsi que sur la supériorité du « génie russe » sur les autres nations. Il attribue un rôle messianique au peuple russe, seul peuple capable de comprendre tous les autres et d’avoir ses spécificités nationales. Selon lui, le peuple russe a pour mission d’apporter le bonheur à l’humanité.

À la fin de sa vie, Dostoïevski est devenu un fervent croyant et a abandonné l’agnosticisme de ses premières années.

Il succombe à une hémorragie le 9 février 1881. Ses obsèques nationales ont lieu le 12 février 1881 et sont suivies par trente mille personnes. Il est enterré au cimetière Tikhvine à Saint-Pétersbourg.

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Sources : Wikipédia, YouTube.

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