Claus von Stauffenberg, militaire.

Le comte (Graf) Claus Philipp Maria Schenk von Stauffenberg est un officier de la Wehrmacht, né le 15 novembre 1907 à Jettingen-Scheppach et mort le 21 juillet 1944 à Berlin. Il est l’une des figures centrales de la résistance militaire contre le nazisme.

Alors qu’il est chef d’état-major auprès du commandant de l’Armée de réserve et de l’intérieur (Ersatzheer), Stauffenberg participe à un complot contre Adolf Hitler, organisant personnellement l’attentat du 20 juillet 1944, dans le cadre du coup d’État militaire avorté, connu aussi sous le nom d’opération Walkyrie.

Stauffenberg a tout d’abord montré sa sympathie pour différents aspects du national-socialisme, comme le nationalisme ou le révisionnisme concernant le traité de Versailles, jusqu’à ce que le caractère criminel du régime le pousse à la résistance à dater de 1942.


Après le baccalauréat (Abitur), Stauffenberg s’engage dans la Reichswehr le 5 mars 1926. Il commence son service au 17e régiment de cavalerie de Bamberg où il est incorporé comme Fahnenjunkera. Après un an de service, il est envoyé à l’école d’infanterie de Dresde où tous les aspirants officiers doivent suivre une formation d’un an. En 1928, il est muté à l’école de cavalerie de Hanovre puis retourne à son régiment de Bamberg où il devient lieutenant le 1er janvier 1930 après être reçu à l’examen en sortant major de promotion.

Vers la fin de la république de Weimar, Stauffenberg, tout comme son frère Berthold, est proche des cercles de la révolution conservatrice. Même s’il montre du mépris pour le parti nazi qui monte, de nombreux points de cette pensée politique l’intéressent : « L’idée d’un Führer… associée à celle d’une communauté nationale, le principe selon lequel le bien commun passe avant le bien privé et le combat contre la corruption, le combat contre l’esprit des grandes villes, l’idée de races et la volonté d’un nouvel ordre juridique allemand nous apparaît comme sain et porteur d’avenir ».

Lors de l’élection présidentielle de 1932, Stauffenberg se prononce alors contre le président en exercice, le conservateur et monarchiste Paul von Hindenburg et pour Adolf Hitler dont il salue clairement la nomination au poste de chancelier du Reich le 30 janvier 1933. Stauffenberg participe à la formation militaire des membres des SA et organise la remise de dépôts d’armes à la Reichswehr.

Le 26 septembre 1933, il épouse à Bamberg Nina von Lerchenfeld avec qui il a cinq enfants : Berthold, Heimeran, Franz-Ludwig, Valerie et Konstanze (en). Sa femme Nina meurt le 2 avril 2006 à l’âge de quatre-vingt-douze ans, à Kirchlauter, près de Bamberg.

En 1934, Stauffenberg est muté à l’école de cavalerie de Hanovre en tant que Bereiter-Offizier (officier qui s’occupe des chevaux). À Hanovre, il se qualifie grâce à ses études sur les armes modernes (chars blindés et troupes aéroportées). Par la suite, il s’intéresse toutefois à l’utilisation militaire du cheval. Le 1er octobre 1936, il est envoyé à l’académie militaire de Berlin-Moabit pour y suivre une formation au sein de l’état-major général. Le 1er janvier 1937, il est promu Rittmeister. En juin de l’année suivante, il sert comme deuxième officier d’état-major général à l’état-major de la Ier division légère à Wuppertal sous les ordres du lieutenant-général Erich Hoepner avec lequel il prend part à l’occupation des Sudètes la même année.

Avec le début de la Seconde Guerre mondiale que Stauffenberg accueille comme une « rédemption », il est incorporé à la Ire division légère (plus tard VIe division de blindés de la Wehrmacht) dans la campagne de Pologne en 1939. De là-bas, il écrit à sa femme : « La population est une incroyable populace, très nombreux Juifs et très nombreuses personnes qui ne sont pas de race pure. Un peuple qui ne se sent bien que sous le knout. Les milliers de prisonniers vont faire vraiment du bien à notre économie agricole. En Allemagne, ils pourront sûrement être bien utilisés, vaillants, obéissants et se contentant de peu ».

L’historien Heinrich August Winkler cite cette lettre afin de prouver qu’à cette époque, Stauffenberg souscrit à la politique raciale des nazis, pour ne pas dire qu’il la souhaite. Même l’historien israélien Saul Friedländer suppose que l’attitude de Stauffenberg envers les Juifs ne se distingue de l’antisémitisme nazi que graduellement, et non sur le principe. Le biographe de Stauffenberg, Peter Hoffmann, réfute en revanche le terme d’antisémite pour Stauffenberg. Pour lui, la méthode d’interprétation de la lettre comme antisémite est insuffisante : « On doit analyser les propos et voir le contexte. En tant qu’historien, j’ai le devoir d’analyser le contexte et de rechercher, et non de donner des morceaux d’information ».

Peter Yorck von Wartenburg, un parent éloigné, et Ulrich Wilhelm Schwerin von Schwanenfeld demandent à Stauffenberg de se faire nommer adjoint du commandant en chef de l’armée de terre Walther von Brauchitsch, pour pouvoir prendre part à une tentative de renversement. Stauffenberg refuse. En 1940, il participe, en tant qu’officier d’état-major général, à la bataille de France. Le 31 mai 1940, il reçoit la croix de fer de première classe. Il est ensuite muté à la section d’organisation du commandement suprême de l’Armée de terre. En décembre 1941, Stauffenberg approuve le fait que Hitler réunisse dans ses mains le commandement suprême de l’armée de terre (après le limogeage de Brauchitsch, à la suite de l’échec de la bataille de Moscou) et celui de l’ensemble des forces armées.

En tant que chef du groupe II de la division d’organisation au sein du commandement suprême de l’Armée de terre, Stauffenberg fait partie des officiers importants qui ont consciemment travaillé à un changement de politique dans les territoires occupés. Il s’occupe de la question des volontaires dans la Légion de l’Est, en particulier lors des opérations militaires du Groupe A dans le Caucase. Il s’agit alors de rallier des prisonniers libérés et des déserteurs à la cause allemande. Sa division donne des directives, le 2 juin 1942, concernant le traitement des soldats du Turkestan et du Caucase, et commande, en août 1942, l’organisation et le déploiement des légions de l’Est.

À la mi-novembre 1942, la Xe division de blindés prend encore part à l’occupation de la zone française jusque-là restée libre. Immédiatement après, la division est envoyée à Tunis. Entre-temps, Stauffenberg est incorporé à l’état-major de l’armée et est promu Oberstleutnant à l’état-major général le 1er janvier 1943. En mars 1943, il est muté en tant que premier officier d’état-major général à la Xe division de blindés, qui doit alors couvrir la retraite de l’armée du maréchal Rommel contre les Alliés qui viennent de débarquer en Afrique du Nord. Pendant une mission de reconnaissance, son véhicule est mitraillé par un chasseur-bombardier allié. Il est grièvement blessé. Il passe trois mois à l’hôpital, où il est opéré par le célèbre chirurgien Ferdinand Sauerbruch et perd son œil gauche, sa main droite, ainsi que l’annulaire et l’auriculaire de sa main gauche — il en plaisantera ultérieurement, prétendant qu’il ne se souvenait pas de ce qu’il faisait de ses dix doigts quand il les avait encore. Sa convalescence se  déroule à Albstadt-Lautlingen.

Ses mutilations et ses blessures ne l’empêchent pas de se battre pour être de nouveau apte au service armé.

Le fait de survivre à ses graves blessures renforce en Stauffenberg la conviction qu’il doit faire quelque chose pour préserver l’Allemagne de la catastrophe définitive. Bien qu’il ne puisse plus servir dans l’armée, il cherche à jouer encore un rôle. À l’automne 1943, il se manifeste une nouvelle fois à Berlin et y cherche des contacts parmi les adversaires d’Hitler réunis autour du général Friedrich Olbricht et du général de brigade Henning von Tresckow.

Avec Olbricht, Tresckow et le colonel Albrecht Mertz von Quirnheim,  Stauffenberg travaille aux plans de l’opération Walkyrie. Officiellement, le plan doit servir à réprimer de possibles révoltes intérieures comme celle des nombreux travailleurs étrangers. Stauffenberg et Tresckow ajoutent des ordres supplémentaires au projet et font de l’opération Walkyrie un plan d’opération pour le coup d’État. Celui-ci prévoit d’accuser un groupe de fonctionnaires du parti de l’assassinat d’Hitler, afin de pouvoir par la suite procéder à l’arrestation des membres du Parti national-socialiste des travailleurs allemands, de la SS, du Sicherheitsdienst et de la Gestapo. Les commandants des différentes divisions militaires allemandes doivent recevoir les ordres correspondants après le déclenchement de l’opération et l’armée doit prendre en main les rênes du pouvoir. Stauffenberg devait recevoir le poste de secrétaire d’État au sein du ministère de la Défense du Reich.

Stauffenberg est nommé chef d’état-major au Bendlerblock à Berlin où il a alors accès à ce qui se dit au quartier général du Führer sur la situation. Il est sous les ordres d’Olbricht qui l’encourage à construire un réseau militaire d’opposition. Stauffenberg coordonne les plans d’attentat avec Carl  Friedrich Goerdeler et le général de corps d’armée Ludwig Beck et reste en contact avec la résistance civile comme Julius Leber, Wilhelm Leuschner ou les membres du Cercle de Kreisau auquel appartient son cousin Peter Yorck von Wartenburg. Après l’arrestation de Helmuth James von Moltke en janvier 1944, le Cercle de Kreisau ne se réunit plus. La majorité des membres se met à la disposition de Stauffenberg, malgré les réticences de Moltke sur le fait de tuer Hitler.

Le 1er juillet 1944, Stauffenberg devient chef de l’état-major (Chef des Stabes) auprès du commandant de l’Ersatzheer (l’armée de réserve), le général Friedrich Fromm et est promu au grade de colonel. Avec Olbricht et Mertz von Quirnheim, il est dans le centre de commandement de  l’opération Walkyrie. Un des points délicats du plan est le fait qu’il doit exécuter l’attentat et mener le coup d’État de Berlin. Le 11 juillet à Obersalzberg et le 15 juillet au quartier général de la Wolfsschanze déjà, Stauffenberg essaie de tuer Adolf Hitler. Il stoppe les deux tentatives à cause de l’absence soit d’Heinrich Himmler et/ou d’Hermann Göring. L’attentat ne pouvait pas être repoussé une troisième fois.

L’ultime tentative débute par hasard le 18 juillet lorsque Stauffenberg est appelé à venir au quartier général du Führer pour parler de nouveaux déploiements de troupes. Le groupe de résistance a alors déjà détaillé les membres du nouveau gouvernement et il ne reste plus qu’à exécuter Hitler. Stauffenberg prend un avion à l’aérodrome de Rangsdorf (de) près de Berlin le 20 juillet à 7 heures avec Werner von Haeften pour se rendre à la Wolfsschanze (la « tanière du Loup ») près de Rastenburg en Prusse-Orientale.

L’entretien étant inopinément avancé d’une demi-heure en raison d’une visite prévue de Benito Mussolini, Stauffenberg n’arrive à amorcer qu’une seule des deux charges explosives, avec deux détonateurs chimiques-mécaniques britanniques, à l’aide d’une pince spécialement conçue pour lui (il ne lui reste que trois doigts à la main gauche). Il emporte donc la seconde charge, pour s’en débarrasser discrètement ensuite.

Ironiquement, des expériences ultérieures ont démontré que si  Stauffenberg avait simplement mis aussi la seconde charge dans la sacoche jaune où a été placée la première, la première explosion aurait joué le rôle de détonateur de manière suffisamment efficace pour provoquer une explosion bien plus puissante qui, à en juger par les dégâts occasionnés sur des mannequins utilisés pour ces tests, aurait tué Hitler. De plus, à cause de travaux dans le Führerbunker habituel, l’entretien a lieu dans un cabanon en bois. Stauffenberg pose la sacoche à portée létale d’Hitler, mais elle est déplacée par le colonel Heinz Brandt, qui ignore ce qu’elle contient, derrière un des pieds (en bois massif) de la table, ce qui allait protéger Hitler de l’essentiel des effets de l’explosion. Stauffenberg quitte la pièce sous le prétexte de devoir téléphoner. Si Rudolf-Christoph von Gersdorff avait tenté de faire exploser une bombe qu’il portait sur lui en se tenant le plus près possible d’Adolf Hitler, il aurait pu réussir. Stauffenberg ne pouvait se sacrifier, puisqu’il joue un rôle crucial dans le coup d’État qui doit suivre l’assassinat.

La charge explosive détone à 12 h 42 dans la baraque où sont réunies vingt-quatre personnes. Mais Hitler et dix-neuf autres personnes présentes survivent à la détonation. D’un abri proche, Stauffenberg attend que l’explosion ravage l’intérieur du cabanon. Puis, convaincu que personne ne peut avoir survécu à une telle déflagration, Stauffenberg et son aide de camp, le lieutenant Werner von Haeften, quittent rapidement les lieux pour rejoindre Berlin à bord d’un Heinkel He 111. À Berlin, les conjurés et notamment Olbricht, qui dirige les opérations sur place, hésitent à mettre en place le plan du putsch car ils ne reçoivent aucune nouvelle claire de la mort d’Hitler. À 15 h, Stauffenberg, toujours persuadé de la mort d’Hitler, en informe Olbricht, depuis Rangsdorf, et part le voir au Bendlerblock. Ce n’est qu’à ce moment, plus de deux heures après l’attentat, donc tardivement, que l’opération Walkyrie est déclenchée. Georg et Philipp von Boeselager se tiennent prêts à marcher sur Berlin avec leurs régiments. Stauffenberg, Olbricht, Mertz von Quirnheim et Haeften sont arrêtés par Fromm qui les avait couverts jusqu’alors mais qui ne veut plus rien entendre d’une tentative de putsch, les informations restant floues.

Vers 18 h, le coup d’État semble avoir réussi. Dans certaines divisions militaires, les opérations se mettent en place. Tard dans la soirée, Hitler prend la parole à la radio. Les téléscripts contenant les indications des conjurés et arrivant dans les centres de commandement ne sont plus suivis. La plupart des officiers temporisent alors face aux informations  contradictoires qui leur sont communiquées. Le coup d’État échoue. Stauffenberg et son aide de camp étant en fuite, l’ordre de les abattre est lancé par le quartier général du Führer, mais il arrive chez un membre de la conspiration, Friedrich Georgi, officier de l’état-major de l’Air, et n’est pas transmis.

Vers 22 h 30, un groupe d’officiers restés fidèles au régime auquel appartient Otto-Ernst Remer arrête Stauffenberg et les conjurés. Appliquant les décisions d’une prétendue cour martiale décidée et dirigée à la hâte par Fromm, dont le but aura été probablement d’effacer toutes traces de son implication dans le complot, ce dernier donne le soir même du 20 juillet l’ordre de fusiller Claus von Stauffenberg, Werner von Haeften, Albrecht Ritter Mertz von Quirnheim et Friedrich Olbricht. L’exécution a lieu peu avant 1 h du matin le 21 juillet dans la cour du Bendlerblock. Les derniers mots de Stauffenberg auraient été « Vive l’Allemagne sacrée ! ». Le lendemain, les corps des fusillés sont inhumés avec leurs uniformes et médailles à l’ancien cimetière Saint-Matthieu. Hitler les fait exhumer et donne l’ordre de les brûler. Leurs cendres sont dispersées au-dessus d’un champ d’épandage de Berlin.

Hitler a envisagé de faire assassiner les familles des conjurés et d’effacer leur nom de famille : « La famille Stauffenberg sera détruite jusqu’au dernier membre ». La vengeance envisagée dans les premiers temps est rejetée au profit d’une Sippenhaft. L’épouse de Stauffenberg, Nina von Stauffenberg alors enceinte, est déportée au camp de Ravensbrück, puis peu avant son accouchement dans un centre de maternité nazi à Francfort-sur-l’Oder où elle accouche du cinquième enfant de la famille, Konstanze, en 1945. Les enfants sont envoyés dans un orphelinat, une « institution spéciale », à Bad Sachsa. Là, ils côtoient ceux de Caesar von Hofacker, de Wessel Freytag von Loringhoven, de Henning von Tresckow, etc.

Source : Wikipédia.

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