Benito Mussolini, journaliste, idéologue et homme d’état.

Benito Mussolini, né le 29 juillet 1883 à Predappio et mort le 28 avril 1945 à Giulino di Mezzegra, est un journaliste, idéologue et homme d’État italien.

Fondateur du fascisme, il est président du Conseil du royaume d’Italie, du 31 octobre 1922 au 25 juillet 1943, premier maréchal d’Empire du 30 mars 1938 au 25 juillet 1943, et chef de l’État de la République sociale italienne (RSI) de septembre 1943 à avril 1945. Il est couramment désigné par le terme « Duce », mot italien dérivé du latin Dux et signifiant « Chef » ou « Guide ».

Il est d’abord membre du Parti socialiste italien (PSI) et directeur du quotidien socialiste Avanti ! à partir de 1912. Anti-interventionniste convaincu avant la Première Guerre mondiale, il change d’opinion en 1914, se déclarant favorable à l’entrée en guerre de l’Italie. Expulsé du PSI en novembre 1914, il crée son propre journal, Il Popolo d’Italia (Le peuple d’Italie) qui prend des positions nationalistes proches de celles de la petite bourgeoisie. Dans l’immédiate après-guerre, profitant du mécontentement de la « victoire mutilée », il crée le Parti national fasciste (PNF) en 1921 et se présente au pays avec un programme politique nationaliste, autoritaire, antisocialiste et antisyndical, ce qui lui vaut l’appui de la petite bourgeoisie et d’une partie des classes moyennes industrielles et agraires.

Dans le contexte de forte instabilité politique et sociale qui suit la Grande Guerre, il vise la prise du pouvoir en forçant la main aux institutions avec l’aide des paramilitaires squadristi et l’intimidation qui culminent le 28 octobre 1922 avec la marche sur Rome. Mussolini obtient la charge de constituer le gouvernement le 30 octobre 1922. En 1924, après la victoire contestée des élections et l’assassinat du député socialiste Giacomo Matteotti, Mussolini assume l’entière responsabilité de la situation. La série de lois fascistissimes lui attribue, à partir de 1925, des pouvoirs dictatoriaux et fait de l’Italie un régime fasciste à parti unique.

Mussolini, carte maximum, Italie.

Après 1935, il se rapproche du régime nazi d’Adolf Hitler, avec qui il établit le pacte d’acier (1939). Convaincu d’un conflit à l’issue rapide, il entre dans la Seconde Guerre mondiale au côté de l’Allemagne nazie. Les défaites militaires de l’Italie et le débarquement des Alliés sur le sol italien entraînent sa mise en minorité par le Grand Conseil du fascisme le 24 juillet 1943 : il est alors destitué et arrêté par ordre du roi. Libéré par les Allemands, il instaure en Italie septentrionale la République sociale italienne. Le 25 avril 1945, alors qu’il tente de fuir pour la Valteline déguisé en soldat allemand, il est capturé par un groupe de partisans. Il est ensuite fusillé avec sa maîtresse Clara Petacci ; leurs corps sont livrés à une foule en colère et pendus par les pieds au carrefour de Piazzale Loreto, à Milan.


De juin 1902 à novembre 1904, Mussolini vit en Suisse, se déplaçant de ville en ville et occupant des emplois occasionnels (maçon, manœuvre, etc.). Vivant misérablement, il est arrêté pour vagabondage par la police dans la matinée du 24 juillet 1902 sous les arches du Grand-Pont à Lausanne, où il avait passé la nuit. Dans ses poches sont trouvés son passeport, son diplôme de l’école normale et quinze centimes.

En août 1902, il s’inscrit auprès du syndicat des maçons et des manœuvriers et en devient le secrétaire. Il publie son premier article dans L’avvenire del lavoratore (L’avenir du travailleur) dont il devint le rédacteur. Le syndicat italien des maçons et manœuvres exerçait une forte influence sur la colonie transalpine de Lausanne. Ces débuts modestes de militant obscur vont néanmoins lui permettre, en moins d’un an, de se faire connaître et apprécier du milieu socialiste italien et de ses dirigeants en exil. Il affirme alors son rejet viscéral de la social-démocratie, du « socialisme de la chaire », du « socialisme de tagliatelles » ; par tempérament et culture politique, il incline à l’activisme révolutionnaire. En Suisse, la fréquentation des ouvriers, le contact avec des animateurs du socialisme révolutionnaire, l’engagement dans une authentique action militante vont faire de lui, au moins pour la durée de son séjour, un agitateur et un professionnel de la révolution. Le 18 juin 1903, il est arrêté dans le canton de Berne comme agitateur socialiste pour avoir soutenu le projet d’une grève générale en ayant éventuellement recours à la violence. Il est maintenu en prison douze jours puis expulsé vers l’Italie le 30 juin.

Jusqu’à l’automne 1903, Mussolini consacre la majeure partie de son temps à faire de l’agitation politique et à mobiliser ses compatriotes immigrés, sillonnant la Confédération suisse pour porter la parole socialiste ou soutenir des travailleurs en grève. Dans L’avvenire del lavoratore, il publie des correspondances syndicales, des poèmes (dont un sonnet à Babeuf), une quinzaine d’articles sur « le socialisme suisse », « la nécessité de la politique socialiste en Italie », « le massacre des Arméniens »… Il écrit aussi dans Proletario ou L’Avanguardia socialista21. À cette époque, il se range dans l’aile révolutionnaire du Parti socialiste italien (PSI) dirigée par Arturo Labriola et envoie des articles au journal milanais l’Avangardia socialista. C’est au cours de cette période qu’il fait preuve de la plus grande affinité idéologique avec le syndicalisme révolutionnaire. Il fréquente deux mois la faculté des sciences sociales et politiques de l’Université de Lausanne, où il s’intéresse à la pensée de l’économiste Vilfredo Pareto, critique acerbe de la démocratie libérale et à l’un des cours de qui il assiste. Il s’investit notamment dans les polémiques anticléricales par exemple au travers d’un débat avec le pasteur évangélique Alfredo Taglialatela sur le thème de l’existence de Dieu.

Le 30 décembre 1903, il se rapproche de l’avocat socialiste originaire de Sienne, Salvatore Donatini, avec qui il projette de fonder une revue, I Tiempi nuovi. Celui-ci ayant été expulsé, Mussolini le suit en France mais le projet de revue n’aboutit pas faute de moyens financiers. On sait peu de chose sur ce séjour en France que Mussolini n’évoquait pas et au cours duquel il aurait travaillé comme charretier dans une carrière de sable. Le 18 mars 1904, il rencontre l’activiste socialiste russe Angelica Balabanova à Lausanne lors d’un meeting commémorant la Commune de Paris. En avril 1904, il est expulsé du canton de Genève pour avoir modifié la date de validité de son passeport. Il est libéré à Bellinzone grâce aux protestations des socialistes genevois et à l’aide du gouvernement tessinois. Il est emprisonné pendant sept jours à partir du 9 avril 1904. Le 13 novembre 1904, il prononce une conférence sur le néo-marxisme dans laquelle il réaffirme la validité et l’actualité de la pensée de Marx, contre ceux qui appelaient à la révision de la pensée marxiste.

En novembre 1904, en raison de l’amnistie accordée lors de la naissance de l’héritier du royaume, Mussolini revient en Italie alors qu’il est sous le coup d’une condamnation pour refus du service militaire. Il effectue son service militaire, est affecté le 30 décembre 1904 au dixième régiment bersaglier de Vérone où il obtient son certificat de bonne conduite. Entre-temps, le 19 janvier 1905, sa mère meurt. Libéré au terme prévu, Mussolini rentre à Dovia di Predappio le 4 septembre 1906 où il devient maître suppléant à Tolmezzo du 15 novembre jusqu’à la fin de l’année scolaire ; mais son poste ne lui est pas renouvelé en raison de sa vie dissipée. En novembre 1907, il obtient l’habilitation pour l’enseignement du français mais échoue à celle d’allemand. En mars 1908, il obtient la charge de professeur de français au collège d’Oneglia, où il enseigne aussi l’italien, l’histoire et la géographie. Il est donc polyglotte, maîtrisant le français, l’anglais et l’allemand.

À Oneglia, il dirige l’hebdomadaire socialiste La Lima sous le pseudonyme de « Vero Eretico » (vrai hérétique). L’été 1908 marque un changement avec son engagement direct dans l’agitation menée par les braccianti de Forlì. Le 18 juillet 1908, il est arrêté pour menaces envers un dirigeant d’une organisation patronale. Jugé, il est condamné à trois mois de prison mais il est relaxé en appel. En septembre, il est de nouveau incarcéré pendant dix jours pour avoir tenu à Meldola une réunion non autorisée. Ces arrestations lui confèrent un réel prestige auprès des braccianti et des socialistes de la région. Il publie des articles dans la revue Pagine libere, la principale publication syndicaliste révolutionnaire dirigée par Oliviero Olivetti et dans Il Pensierio romagnolo du républicain Giuseppe Gaudenzi. C’est dans cette revue que parut en novembre et décembre 1908 en trois livraisons La Philosophie de la force, l’essai d’interprétation de la pensée de Nietzsche.

En janvier 1909, la réputation acquise par Mussolini sur le terrain de l’action sociale et politique et du journalisme, ainsi que les liens d’amitié entretenus avec Serrati et Angelica Balabanoff concourent à décider les dirigeants de la chambre du travail de Trente à lui offrir le poste de secrétaire de cette organisation et la direction de l’hebdomadaire du parti socialiste tridentin L’avvenire del lavoratore (L’avenir du travailleur). Sous sa direction, le tirage de L’avvenire del lavoratore augmente de cinquante pour cent en six mois. Il entretient d’excellentes relations avec le socialiste irrédentiste Cesare Battisti qui lui confie également la direction de son journal Il Popolo (Le peuple). Entre février et septembre 1909, il signe cent articles, notes, recensions et essais historico-littéraires. Le 7 mars, il tient une joute journalistique avec Alcide De Gasperi d’orientation catholique, directeur du périodique Il Trentino. Mussolini réédite ce qu’il avait fait en Suisse à savoir dynamiser une organisation socialiste somnolente et apathique tout en ne rentrant pas en conflit avec la direction du parti. Le 10 septembre, il est emprisonné à Rovereto pour diffusion de journaux instigateurs de violences envers l’Empire d’Autriche et le 29 il est expulsé et retourne à Forlì. Les huit mois passés dans le Trentin confortent Mussolini dans ses convictions syndicalistes révolutionnaires nourries dans la riche bibliothèque nationale de la ville où il passe une bonne partie de son temps : son goût et le culte de l’action, une philosophie pragmatiste, la nécessité de la volonté pour changer le monde et façonner sur le modèle nietzschéen un homme nouveau.

Il revient à Predappio fin 1909, où il dirige la grève des journaliers agricoles. En novembre, il s’installe à Forlì où il vit avec son père qui crée avec sa compagne Anna Lombardi (veuve de Guidi, mère de la future épouse du duce) la taverne Il bersagliere. Au cours de cette période, Mussolini écrit dans Pagine libere (Pages libres), revue du syndicalisme révolutionnaire éditée à Lugano et dirigée par Angelo Oliviero Olivetti, l’article La filosofia della forza (La philosophie de la force) où il fait référence à la pensée de Nietzsche.

Au début de la Première Guerre mondiale, il s’aligne sur les positions de l’Internationale socialiste, se déclarant ouvertement opposé à  l’intervention de l’Italie qui, d’après lui, ne servirait que l’intérêt de la bourgeoisie. Cependant, se développe en 1914 un interventionnisme de gauche allant des républicains et des socialistes réformistes aux syndicalistes révolutionnaires : le 7 octobre 1914, des représentants du syndicalisme révolutionnaire comme Libero Tancredi (pseudonyme de Massimo Rocca), Filippo Corridoni et Cesare Rossi signent l’appel du Faisceau révolutionnaire d’action interventionniste ; ce manifeste vise à constituer un mouvement informel pour rassembler les éléments de la gauche radicale favorable à l’entrée en guerre de l’Italie contre les Empires centraux. Le mot faisceau appartient au vocabulaire politique de la gauche italienne qui trouve son origine dans les faisceaux de travailleurs siciliens61. Les signataires du manifeste souhaitent l’entrée en guerre par hostilité aux Empires centraux réactionnaires et cléricaux et volonté, notamment chez les syndicalistes et socialistes révolutionnaires, de préparer techniquement le prolétariat au combat et de forger ainsi en son sein une élite révolutionnaire et combattante. Benito Mussolini ne signe pas le manifeste mais ces idées rejoignent sa théorie de la nécessité du combat révolutionnaire et d’une élite socialiste combattante ; sa parution l’incite à faire connaître sa propre opposition à la neutralité car cette initiative était de nature à faire pièce à son influence au sein de l’ultragauche interventionniste. Ce ralliement provoqua l’enthousiasme des journaux de la gauche antineutraliste comme L’Internazionale, Pagine Libere (syndicaliste révolutionnaire), La Voce, L’Iniziativa (républicaine), La Folla (anarchiste), Azione socialista (socialiste) et fut bien reçu des socialistes français et belges qui le soutinrent financièrement pendant la guerre.

Cependant, à la suite de cette prise de position contraire à la ligne du parti, il est forcé à la démission, le 20 octobre 1914, de L’Avanti !, puis exclu du PSI le 29 novembre 1914, à la suite de la publication, le 18 octobre, de l’article Dalla neutralità assoluta alla neutralità attiva ed operante (De la neutralité absolue à la neutralité active et agissante), qui qualifie la neutralité de réactionnaire et signe son ralliement à la campagne interventionniste entamée le 5 octobre par le manifeste des Faisceaux d’action internationaliste. Mussolini préconise désormais une politique militariste ainsi que l’entrée en guerre de l’Italie en 1915 aux côtés de l’Entente.

Après l’entrée en guerre de l’Italie à la suite du pacte de Londres (mai 1915), Mussolini est affecté en août 1915 au 11e bersaglier puis envoyé sur le front alpin le 2 septembre 1915. Dans son journal de guerre, outre raconter la vie dans les tranchées, il s’imagine en héros charismatique dans une  communauté nationale guerrière et obéissante. Nommé caporal le 1er mars 1916, ses supérieurs écrivent dans son fascicule militaire : « Activité exemplaire, qualité de combattant, esprit de sérénité, volontaire, zélé, régularité dans la réalisation de ses devoirs ». Blessé par l’explosion d’un mortier lors d’un exercice, le 23 février 1917, il est réformé. De retour du front, en décembre, il publie dans Il Popolo d’Italia l’article Trincerocrazia dans lequel il revendique, pour les futurs anciens combattants, le « droit » de gouverner l’Italie après la fin de la guerre. Dès l’automne 1917, il reçoit cent livres sterling par semaine du MI5 (l’équivalent, en 2009, de six mille livres) afin non seulement de faire de la propagande militariste, mais aussi de mener de violents assauts contre les manifestants pacifiques, notamment à Milan, afin d’éviter toute paralysie de l’industrie. Après le retrait de la Russie révolutionnaire, Londres craint en effet que l’Italie ne se retire aussi du conflit. Ces paiements, qui ont duré au moins un an, ont été autorisés par le député britannique et homme du MI5 en Italie Samuel Hoare, qui révéla leur existence dans ses Mémoires publiés en 1954.

Dans les premiers mois de 1922, Mussolini cherche à se forger une stature internationale. En janvier 1922, il va à Cannes pour suivre en tant que journaliste les travaux de la conférence internationale pour discuter des problèmes du commerce international. De là, il va à Paris pour voir le café du Croissant où Jaurès fut assassiné, lieu qui dira-t-il l’a « plus ému que le mur des Fédérés vers lequel était toujours allée mon adolescence de rebelle. » En août 1922, la gauche lance une grève contre les violences des chemises noires qui interviennent provoquant l’échec du mouvement. Entre-temps, entre le 3 août et le 5 septembre, les squadristes fascistes occupent les mairies d’Ancône, Milan, Gênes, Livourne, Parme, Bolzano, Trente, après de violents combats armés. Certaines villes résistent comme Parme. Il s’agit du début de la « révolution fasciste » avec lequel Mussolini tente un ambitieux coup de main pour prendre possession du pouvoir. Le 24 octobre 1922 défilent à Naples quarante mille Chemises noires affirmant le droit du fascisme à gouverner l’Italie.

Entre les 27 et 31 octobre 1922, la révolution fasciste atteint son apogée avec la marche sur Rome, opération des groupes de chemises noires provenant de différentes régions d’Italie et commandés par un quadriumvirat (Italo Balbo, Cesare Maria De Vecchi, Emilio De Bono et Michele Bianchi). Le nombre de personnes n’a jamais été établi avec précision, il oscille entre trente mille et cent mille.

Mussolini ne prend pas part directement à la marche. En effet, il craint que le gouvernement ne lui oppose l’armée, ce qui provoquerait l’échec de l’opération. Il reste à Milan en attendant le développement de l’opération et ne se rend à Rome que plus tard, une fois connu le bilan de ce déploiement de force. À Milan, le soir du 26 octobre, il affiche sa tranquillité auprès de l’opinion publique en assistant au Cygne de Molnàr au théâtre Manzoni. Au cours de ces jours décisifs, il traite directement avec le gouvernement de Rome sur les concessions que celui-ci est prêt à faire aux fascistes et le futur Duce nourrit des inquiétudes sur le résultat de ce qu’il sait être un coup de bluff et qui échouera lamentablement si l’armée reçoit l’ordre d’arrêter ses troupes et s’en donne les moyens.

Victor-Emmanuel III refuse de signer l’état de siège proposé par le  président du conseil Luigi Facta. Pourquoi ? Parce qu’il estime que Facta a déjà commencé à l’appliquer sans son aval. Il est blessé dans son honneur et ses prérogatives de souverain. Privé des moyens de faire face à la situation, Facta démissionne (28 octobre) et le roi offre à Mussolini la charge de former un nouveau gouvernement de coalition (29 octobre).

Mussolini bénéficie par ailleurs du soutien des officiers supérieurs et des industriels, traditionnels soutiens de la maison de Savoie, qui voient en lui l’homme fort susceptible de ramener l’ordre dans le pays et de « normaliser » la situation sociale italienne.

Le 16 novembre Mussolini présente son programme politique à la Chambre dans lequel il déclare : « Je me suis refusé de remporter une victoire éclatante, et je pouvais remporter une victoire éclatante. Je me suis imposé des limites. Je me suis dit que la meilleure sagesse est celle qui ne s’abandonne pas après la victoire. Avec trois cent mille jeunes armés, décidés à tout et presque mystiquement prêts à un de mes ordres, moi, je pouvais punir tous ceux qui ont diffamé ou tenté de salir le fascisme. Je pouvais faire de cette salle sourde et grise un bivouac de pantins : je pouvais barrer le Parlement et constituer un gouvernement exclusivement de fascistes. Je pouvais : mais je n’ai pas, au moins dans ce premier temps, voulu. » Il obtient la confiance avec 316 voix en sa faveur, 116 contre et seulement 7 abstentions et, de ce fait, est investi pleinement de ses fonctions.

Le 24 novembre 1922, il obtient les pleins pouvoirs en matière économique et administrative jusqu’au 31 décembre 1923 afin de rétablir l’ordre. Le 15 décembre 1922, le Grand Conseil du fascisme se réunit pour la première fois. Le 14 janvier 1923, les chemises noires sont institutionnalisées par la création de la Milice volontaire pour la sécurité nationale (MVSN). Le 9 juin, il présente la nouvelle loi Acerbo en matière électorale, approuvée le 21 juillet. Toujours en juillet, grâce à l’appui britannique, à la conférence de Lausanne, la présence italienne en Dodécanèse, occupée depuis 1912 est reconnue.

Le 28 août 1923, une commission de la Société des Nations dirigée par le général italien Enrico Tellini, dont l’objectif est de définir la frontière entre la Grèce et l’Albanie, est massacrée à Ioannina. Mussolini envoie un ultimatum à la Grèce pour demander réparation et à la suite du refus du gouvernement grec, la marine italienne reçoit l’ordre d’occuper Corfou. Avec cette action le nouveau président du Conseil démontre vouloir poursuivre une politique extérieure forte et il obtient, grâce à la Société des Nations les réparations demandées après l’abandon de l’île occupée.

Le 19 décembre, il préside à la signature de l’accord entre la Confindustria et la Confédération des Corporations fascistes. Le décret royal du 30 décembre 1923 numéro 284 établit la création des agences communales d’assistance (ECA) avec pour objectif la « coordination de toutes les activités, publiques et privées, destinées au secours des indigents, et promouvant l’éducation, l’instruction et l’accès aux métiers et aux arts». Ceux-ci seront unifiés dans deux agences territoriales au sein de l’assistance sanitaire et matérielle des pauvres et de l’enfance abandonnée par le décret royal du 31 mars 1933  numéro 383.

Le 27 janvier 1924, le traité de Rome entre l’Italie et la Yougoslavie est signé dans lequel celle-ci reconnaît l’« italianité » de Fiume annexé le 16 février. Le Roi confère à Mussolini le collier de l’ordre suprême de la très Sainte Annunziata. À partir du 7 février, le gouvernement italien établit des rapports diplomatiques avec l’URSS. Un accord avec le Royaume-Uni permet à l’Italie d’acquérir l’autre rive du fleuve Jubba, région qui est annexée à la Somalie italienne.

Afin de se maintenir au pouvoir, Mussolini utilise plusieurs outils de propagande. Yannick Beaulieu indique que le régime fasciste est l’un des premiers régimes totalitaires, si ce n’est le premier, à reposer en grande partie sur une propagande moderne basée sur une utilisation rationalisée des moyens de communication comme la presse, le cinéma ou les émissions radiodiffusées.

Philip Cannistraro montre que l’adhésion des masses à l’idéologie du régime repose sur les grands rassemblements, les discours fleuves du Duce et leur radiodiffusion dans toute la péninsule. Pour certains, Mussolini était un modèle de propagande : il fut d’ailleurs un exemple pour Adolf Hitler qui lui-même admirait les efforts de Mussolini. Durant sa vie politique, il n’a pas cessé de montrer à ses ennemis qu’il doit être craint et à ses alliés qu’il est digne de confiance et mérite respect et admiration. On peut notamment le voir souvent représenté en tenue militaire le présentant comme un homme puissant, imposant, triomphant et confiant. D’autres représentations le montrent au milieu d’une foule, populaire auprès de la classe ouvrière, adoré du peuple et entretenant des relations assez étroites avec sa population. Il apparaît ainsi tantôt guerrier, tantôt bourgeois.

Afin de prouver sa supériorité aux yeux du monde, il utilise notamment les codes de l’architecture romaine antique et déclare, en 1922, quelques mois avant la Marche sur Rome qui l’amènera à la tête du gouvernement italien : « Rome est notre point de départ et notre référence. Nous rêvons d´une Italie romaine, c’est à dire sage, forte, disciplinée et impériale ». Il se  considère comme un Sauveur, multiplie les références à l’Antique tout en privilégiant une esthétique moderniste, afin d´incarner aux yeux du monde un nouveau César. Cependant, il veut d’autant plus créer un empire130 qui dépassera celui de ce dernier. L’huile sur toile d’Ambrosi131 est un exemple du fait que la propagande fasciste a dès lors envahi l’architecture, l’urbanisme et la sculpture.

Outre la presse, il a également recours à l’art et au sport comme moyen de propagande. Il n’utilise pas la propagande uniquement en temps de conflit mais adapte ses représentations aux différentes périodes que traverse l’Italie. Le cinéma fait partie de sa propagande : Il grido dell’aquila de Mario Volpe qui remonte à 1923 est le premier film de propagande fasciste, parmi les 772 films produits en Italie entre 1930 et 1943, on peut classer comme films de propagande directe ou indirecte environ une centaine. Aussi, l’Italie mussolinienne a utilisé l’événement sportif à des fins de propagande dès la fin des années vingt. Le Duce lui-même, autoproclamé premier sportif d’Italie, est immortalisé par la presse, tantôt en escrimeur, en motocycliste ou en cavalier.

Jusqu’à l’alliance avec l’Allemagne, Mussolini n’a pas originellement de véritables préventions contre les Juifs, ni avant son accession au pouvoir, ni après sa venue au pouvoir car il collabore à des revues à des publications dirigées par des Juifs, a des amis et collaborateurs juifs et entretient pendant une vingtaine d’années une liaison amoureuse avec une  intellectuelle juive connue au parti socialiste, Margherita Sarfatti, et il ne fait jamais de déclaration en faveur des thèses de l’antisémite Preziosi pour lequel il n’a aucune sympathie133. On trouve certaines personnalités juives parmi les premiers bailleurs de fond du fascisme comme le commendatore Elio Jona, le banquier Giuseppe Toeplitz, un certain nombre de grands propriétaires de la région de Ferrare qui soutinrent les escouades squadristes de Balbo. Il y a au moins cinq Juifs parmi les « sansépolcristes » du 23 mars 1919, et au moins trois Juifs dans le martyrologe officiel de la « révolution fasciste » ; de plus, 230 Juifs reçurent le brevet attestant leur participation à la marche sur Rome, et à la fin de 1922, 750 avaient leur carte de membre du parti. Entre 1927 et 1932, sont établies de bonnes relations entre le Duce et les principales personnalités du judaïsme italien et un rapprochement entre le gouvernement fasciste et les milieux sionistes a lieu : Chaïm Weizmann est reçu une première fois par Mussolini en 1926 et en retire l’impression que le dictateur n’est pas hostile au sionisme.

Dès 1928, il y a un fort courant d’adhésion au fascisme de la part de nombreux Juifs italiens : 5 000 adhésions entre octobre 1928 et octobre 1933, soit près de 10 % de la population juive italienne. En 1934, Mussolini reçoit une seconde fois Chaïm Weizmann : ils évoquent un rapprochement avec la France et de la Grande-Bretagne, Mussolini déclare que Jérusalem ne peut être une capitale arabe ; Weizman propose de mettre à disposition de l’Italie fasciste une équipe de savants juifs ; Weizmann et son épouse demandent une photo dédicacée de Mussolini. Néanmoins, lorsque Mussolini rencontre en 1941 le grand mufti de Jérusalem, Amin al-Husseini, il assure au religieux palestinien qu’il est antisioniste.

Le 6 mai 1939, Mussolini signe le pacte d’Acier avec l’Allemagne, qui scelle officiellement la naissance du pacte italo-allemand et qui, à la demande du Duce, ne se limite pas à une alliance défensive mais aussi offensive.

L’invasion de la Pologne se profile. Ciano se rend en Allemagne et tente d’expliquer que l’Italie ne dispose pas des moyens nécessaires pour s’engager aux côtés de l’Allemagne. Les Allemands le rassurent sur une non-intervention anglaise et soviétique, font miroiter la possibilité d’obtenir la Grèce et la Yougoslavie et indiquent que la participation de l’Italie n’est pas requise. L’Allemagne, en ne consultant pas Rome et par le pacte germano-soviétique (23 août), viole les termes de l’alliance. Le 1er septembre, l’Allemagne envahit la Pologne, mettant en marche la Seconde Guerre mondiale. Mussolini déclare la « non-belligérance » et non la neutralité de l’Italie, le terme de « neutre » étant contraire au principe du fascisme, ce qui permet à l’État italien de se maintenir momentanément en dehors du conflit.

Le 10 mars 1940, il accueille à Rome le ministre allemand des Affaires étrangères Joachim von Ribbentrop, qui le sollicite pour entrer en guerre. Le 18 mars, il rencontre Hitler au col du Brenner. Les 16, 22, 24 et 26 avril, il reçoit des messages de Churchill, de Paul Reynaud, de Pie XII et de Roosevelt, qui lui demandent de rester neutre. La France et la Grande-Bretagne sont prêtes à lui garantir une place à la table des négociations dans le cadre d’un règlement de paix et quelques concessions en Afrique même si l’Italie ne participe pas au conflit, ce que Mussolini refuse.

À la suite des succès extraordinaires et inattendus de l’Allemagne nazie entre avril et mai 1940 (chute de Calais, de la Belgique et début de l’évacuation de Dunkerque), Mussolini pense que l’issue de la guerre est désormais décidée et le 10 juin il déclare la guerre à la France et à la Grande-Bretagne165, ce qui a été qualifié de « coup de poignard dans le dos » par l’« Écho de la Falaise » (13 juin 1940).

Face aux contrariétés et aux remontrances de certains collaborateurs importants et de militaires parmi lesquels Dino Grandi, Galeazzo Ciano et le général Enrico Caviglia, Mussolini répond à Badoglio : « J’ai besoin de quelques milliers de morts pour m’asseoir à la table des négociations. »

Dans la guerre contre la France, les troupes italiennes prennent au début une attitude défensive en raison d’un matériel inadapté, du temps nécessaire pour mobiliser les moyens qui ne sont pas suffisants et de la réticence à attaquer les « cousins » français. En août 1939, l’armée italienne dispose de 67 divisions composées de 43 divisions classiques très mal équipées en moyens de transport, 24 divisions spéciales dont 3 cuirassées, 2 motorisées, 3 d’intervention rapide et 5 divisions alpines. Après la  mobilisation de 1940, les effectifs ne dépassent pas 1 600 000, moins qu’en 1915 par manque d’équipements168. Les moyens italiens sont cependant d’une écrasante supériorité numérique sur les Français, car les exigences du front du Nord-Est et l’expédition de Norvège ont vidé les casernes françaises du Sud-Est. Les premiers à prendre l’initiative sont les Alliés : des avions britanniques décollent des aéroports français et bombardent Turin dans la nuit de 11 au 12 juin.

Par mesure de rétorsion, les avions italiens bombardent les bases militaires d’Hyères et de Toulon. Le 14, la zone industrielle de Gênes est bombardée par la Marine française et l’armée italienne reçoit l’ordre de lancer dans les Alpes une offensive programmée le 18 : Mussolini prend conscience de la nécessité d’occuper des territoires avant la fin du conflit, qui semble inévitable. Les Italiens attaquent aussi Bizerte, Bastia et Calvi.

Alors que la France demande un armistice à l’Allemagne le 17 juin, dans les Alpes, une résistance acharnée des Français met en déroute les soldats italiens. Le fort de la Redoute est évacué seulement le 3 juillet. En Briançonnais, en Ubaye, en Maurienne, les Italiens n’ont pas réussi à passer la frontière malgré des pertes importantes. Par endroits, ils perdent même du terrain : le redoutable fort italien du Chaberton (3 136 m) est réduit au silence le 21 juin en un après-midi par seulement quatre mortiers français169. Malgré quelques infiltrations momentanées, les troupes italiennes ne dépassent pas Menton lors de leur offensive sur Nice. La bataille des Alpes met en lumière l’extrême inefficacité de l’armée italienne.

Mussolini participe à un sommet à Munich avec Hitler pour discuter de l’inattendue et imprévue reddition française face à la Wehrmacht : les conditions de paix demandées par le Duce sont acceptées partiellement.

Le 24 juin, la France signe l’armistice avec l’Italie, lui reconnaissant, en plus de l’occupation d’une portion du territoire français frontalier, la  démilitarisation d’une large bande le long des frontières franco-italienne et libyo-tunisienne.

À la nouvelle d’un débarquement allemand imminent au Royaume-Uni (Opération Seelöwe) auquel l’Allemagne ne veut pas associer l’Italie170, Graziani et Italo Balbo, gouverneur de Libye, reçoivent l’ordre d’avancer vers l’Égypte, un ancien protectorat britannique, où ces derniers ont toujours des intérêts (25 juin). Mais le 28, alors qu’il  survole Tobrouk bombardée par les Britanniques, Balbo est abattu par les batteries anti-aériennes italiennes qui l’ont pris pour un avion ennemi. Les premières victoires se révèlent éphémères parce que la guerre se prolonge au-delà de ce qui est prévu, en raison de l’impréparation, la désorganisation et l’insuffisance de l’armée italienne.

Le 27 septembre 1940 l’Italie, l’Allemagne et le Japon s’unissent par le pacte tripartite, auquel adhèrent, dans l’ordre tout au long de la guerre, la Hongrie (20 novembre 1940), la Roumanie (23 novembre), la Slovaquie (24 novembre), la Bulgarie (1er mars 1941) et la Yougoslavie (27 mars).

Le 4 octobre 1940, Mussolini rencontre Hitler au Brenner pour établir d’un commun accord une stratégie militaire. Le 12 octobre, les Allemands prennent le contrôle de la Roumanie, située dans la zone d’influence italienne et riche de gisements pétrolifères nécessaires à l’Italie, une nouvelle fois sans prévenir les Italiens.

En conséquence, Mussolini décide de se lancer dans une « guerre parallèle » à côté de l’allié allemand, afin de ne pas trop dépendre de l’initiative militaire et politique d’Hitler. Il est toujours convaincu que la Grande-Bretagne sera amenée rapidement à pactiser avec le Führer et que le principal front de guerre sera ainsi terminé. Le 15 août 1940, le sous-marin italien « Delfino » torpille près de l’île de Tinos un vieux croiseur léger grec, l’« Helli », qui participe, à la demande du gouvernement grec, à des festivités. Tout ceci se produit sur ordre précis de Mussolini, transmis par lettre à l’amiral Cavagnari, sous-secrétaire à la marine militaire. Il y a de nombreuses frictions avec les états-majors et avec Pietro Badoglio alors chef d’état-major. En effet, la décision de Mussolini va à l’encontre des recommandations de l’état-major qui désire quelques mois d’attente de manière que la conquête en Afrique du Nord soit terminée. Plus de la moitié de l’armée de terre est mobilisée sur cet autre front de telle manière qu’une opération militaire serait difficilement exécutable. Cependant, le 13 octobre, Mussolini annonce à Badoglio qu’il fixe tout de même la date de la prise de la Grèce au 26 octobre malgré les doutes et les appréhensions de ses chefs militaires. En dépit de cette mésentente, Badoglio, chef d’état-major, ne montre pas d’opposition réelle à la volonté du Duce d’attaquer la Grèce. Il se contente d’émettre des réserves face au peu de temps que Mussolini semble prêt à donner pour les préparatifs. Après un entretien houleux avec Mussolini, Badoglio réussit à retarder l’échéance au 28 octobre. L’action est désormais imminente car le Duce s’enthousiasme à l’idée d’une victoire facile qui surprendrait son allié Hitler et dont Mussolini pourrait s’enorgueillir auprès de son peuple dans sa quête pour rendre l’honneur dû à l’Italie : «Jusque-là, en guise de dépouilles de guerre, il ne pouvait guère s’enorgueillir auprès du peuple italien que de l’insignifiante conquête de l’avant-poste stérile du Somaliland britannique en août ». Pour cause, l’Allemagne s’était infiltrée au début du mois de septembre en Roumanie sans en avertir l’Italie. Mussolini souhaite non seulement se venger de cet affront en procédant à une invasion sans en avertir Hitler, mais aussi équilibrer quelque peu la balance entre les deux puissances en termes de conquêtes. Le 19 octobre, Mussolini envoie un communiqué à Hitler pour l’avertir d’une conquête prochaine de la Grèce sans lui faire part de la date exacte de cette opération. Plus tard, le 28 octobre, trois jours après la réception de ladite lettre par Hitler, les deux dictateurs se retrouvent à Florence où Mussolini, ravi, lui annonce que ses troupes ont déjà franchi la frontière grecque depuis l’Albanie.

Entre-temps, la mise en route de cette guerre se fait d’une manière expéditive avec des raisonnements plus spéculatifs que raisonnés qui se fondent tous sur une apparente infériorité de la puissance militaire grecque. À propos de la conquête de la Grèce à venir, Ciano, ministre des Affaires étrangères italien, parle même d’une promenade. A contrario, l’historien Ian Kershaw déclare : « Ce qui se passait pour l’esprit de décision du dictateur n’était en vérité qu’un vernis des plus minces fait d’hypothèses bancales, d’observations superficielles, de jugements d’amateur et d’appréciations dépourvues de tout sens critique ». La remarque de l’historien s’inscrit dans le tableau d’un amas de spéculations de la part de Mussolini et présage une réalité bien différente.

Et en effet, lorsque l’attaque débute, l’hiver, le territoire montagneux ainsi qu’un équipement totalement inadapté empêchent toutes les tentatives d’avancées. L’armée grecque, renforcée par l’arrivée de plus de 70 000 soldats britanniques, se révèle plus aguerrie et organisée que prévu. Les Grecs se montrent donc bien plus combatifs tandis que les Italiens sont d’une faiblesse déplorable par la faute d’un manque de préparatifs. L’appui des nombreuses escadrilles aériennes et navales britanniques est déterminant : les Italiens sont obligés de se replier en territoire albanais, transformant le conflit en une guerre de position. Les munitions et le manque de matériel nuisent au bon déroulement de cette opération qui paraissait déjà condamnée. L’attaque contre la Grèce se conclut par une défaite désastreuse178. Le maréchal Badoglio qui critique ouvertement le Duce pour son amateurisme est limogé178. Un autre désastre accable Mussolini : la moitié de la flotte italienne stationnée à Tarente est mise hors de combat le 11 novembre par l’aviation britannique.

En Afrique, en janvier 1941, les Britanniques procèdent à une vigoureuse contre-offensive qui conduit à la conquête de l’Afrique orientale italienne vers juin 1941. Les dernières troupes italiennes se rendent à Gondar le 21 novembre. La supériorité numérique et technologique des BritanniquesN 27 et la progressive perte d’initiative de la marine italienne ne peuvent que conduire à la défaite.

Par la suite, les combats entre les deux marines ennemies se limitent du côté italien à la guerre sous-marine, à la protection des voies d’approvisionnements entre la Sicile et la Libye italienne, à de sporadiques tentatives d’interceptions de convois britanniques sur la voie Gibraltar-Alexandrie et à des opérations téméraires réalisées par des équipages d’assaut (les MAS, petites barques chargées de tritole qui causent la destruction de nombreux bateaux britanniques et des sous-marins miniatures).

À partir du 15 février 1942, de nombreux renforts italiens rejoignent le front russe pour soutenir l’avancée allemande. En cinq mois, 160 000 soldats sont envoyés sur le front. Le 9 juillet, le Corpo di Spedizione Italiano in Russia (CSIR), confié au général Italo Gariboldi (qui remplace le général Giovanni Messe), se transforme en ARMIR (ARMata Italiana in Russia) et compte 200 000 hommes. L’armée italienne participe à la bataille de Stalingrad qui se révèle décisive pour le destin de la campagne de Russie et plus globalement pour le sort de la guerre : entre le 3 janvier et le 2 février 1943, les forces de l’Axe sont battues et repoussées. Les armées italiennes rentrent en Italie entre avril et mai 1943 avec des pertes estimées à 60 000 hommes.

Les restrictions alimentaires touchent l’Italie : la ration ordinaire de pain est fixée à 150 grammes par jour (250 pour les travailleurs) et la ration semestrielle de pommes de terre établie à quinze kilos par personne. La production agricole italienne s’effondre et la ration en calories des Italiens atteint 50 % de celle des Allemands.

Le 29 avril 1942, Mussolini rencontre Hitler à Salzbourg : pendant cette réunion, les deux chefs de gouvernement se mettent d’accord pour lancer une grande offensive en Afrique septentrionale.

Entre le 26 mai et le 21 juin, les troupes de l’Axe réalisent une avancée victorieuse en Libye (bataille de Gazala), qui provoque la chute de Tobrouk (20 juin), assiégée depuis plus d’un an.

Le 29 juin, Mussolini part pour la Libye où il reste jusqu’au 20 juillet.

Entre le 1er et le 29 juillet, a lieu la première bataille d’El Alamein : les troupes italo-allemandes tentent d’enfoncer les lignes britanniques. Entre le 31 août et le 5 septembre, la dernière tentative de percée par les armées de l’Axe, au cours de la bataille d’Alam el Halfa, est un échec. Pendant la seconde bataille d’El Alamein, (entre le 23 octobre et le 3 novembre), les troupes britanniques du général Bernard Montgomery (qui a remplacé en août le général Claude Auchinleck) battent leurs adversaires, les obligeant à un repli désastreux.

L’avancée britannique se révèle impossible à contenir : le 8 novembre, l’Afrique française, administrée jusqu’alors par le régime de Vichy et théoriquement neutre, est conquise par les troupes américano-britanniques après le débarquement allié au Maroc et en Algérie (opération Torch). La Libye est rapidement perdue (le 23 janvier 1943, Tripoli tombe), et entre le 19 et le 25 février 1943 les forces italo-allemandes sont de nouveau battues à la bataille de Kasserine en Tunisie, que Rommel a fait occuper en janvier. Le 7 mai, les dernières troupes de l’Axe abandonnent l’Afrique.

En novembre et en décembre 1942, Mussolini, abattu et dépressif, se laisse remplacer par Ciano à deux réunions avec Hitler. Le 2 décembre, après dix-huit mois de silence, il revient parler au peuple italien depuis le Palais de Venise.

Le 7 avril 1943, il rencontre Hitler à Salzbourg et lui propose sans succès de négocier un armistice avec les Soviétiques afin de concentrer les forces armées sur les autres fronts de la guerre.

Le 9 juillet, les Alliés débarquent en Sicile, conquérant l’île entière le 17 août.

Le 16 juillet, un groupe de dirigeants mené par Dino Grandi demande la réunion du Grand Conseil du fascisme qui n’avait plus été convoqué depuis 1939. Le 19 juillet, Rome est bombardée alors que Mussolini se trouve à Feltre, en Vénétie, avec Hitler. Les bombardements occasionnent de 2 800 à 3 000 morts et 10 000 blessés.

Le 25 avril 1945, toujours plus isolé et impuissant après que le front de la ligne gothique eut cédé, Mussolini s’installe à Milan et rencontre le cardinal Ildefonso Schuster qui, tenant le rôle de médiateur auprès du CLNAI (Comité de libération nationale Nord Italie), négocie la reddition des forces fascistes, dans l’espoir d’éviter de futures effusions de sang. L’indécision de Mussolini et l’intransigeance des partis rendent impossible le moindre accord. Les Allemands, peu avant l’arrivée du Duce, font savoir au cardinal qu’ils n’ont plus besoin de lui, ayant entre-temps établi un pacte séparé avec les Alliés (bien évidemment sans en informer Hitler) et avec des hommes proches du CLN. Apprenant la nouvelle par Schuster, Mussolini se sent trahi et, définitivement abandonné par les Allemands, il quitte précipitamment l’archevêché.

Malgré l’avis contraire de sa suite, Mussolini décide de quitter Milan tôt le matin, juste avant la libération de la ville par le CLNAI. Les motifs de sa décision ne sont pas très clairs : dans les jours précédents, une ultime résistance dans le fantomatique « réduit de la Valteline » avait été évoquée. Certains pensent qu’une rencontre secrète aurait été organisée avec des émissaires alliés provenant de Suisse, à qui Mussolini se serait rendu, emmenant avec lui d’importants documents. Certains notent que si l’intention était seulement de fuir, Mussolini aurait pu utiliser le trimoteur SM79 prêt à l’aéroport de Bresso aux portes de Milan. Certains personnages mineurs de la RSI et une partie de la famille Petacci l’utilisent pour réapparaître en Espagne le 26 avril. En fin d’après-midi du 25 avril, la colonne de Mussolini part de la préfecture en direction de Côme, puis poursuit vers Menaggio, le long de la berge occidentale du lac. Mussolini passe sa dernière nuit d’homme libre dans une auberge de la petite commune de Grandola, près de la frontière suisse. Le jour suivant, Mussolini, entouré de ses derniers fidèles et Clara Petacci, qui l’a entre-temps rejoint, redescend vers le lac. Sur la route nationale Regina, il rejoint une colonne allemande (troupes anti-aériennes) en retraite et la colonne Pavolini qui, arrivée à Côme le matin, a immédiatement poursuivi le long du lac.

La colonne est arrêtée une première fois à Musso où le lieutenant SS Birzer, chargé peu avant son départ de Gargnano de protéger Mussolini par sa hiérarchie, le convainc de se cacher dans un camion de la colonne allemande en endossant un manteau de sergent de l’aviation allemande201,202. Quelques kilomètres plus loin, la colonne est de nouveau arrêtée à Dongo par un petit groupe de partisans de la 52e Brigade Garibaldi201 sous le commandement du comte florentin Pier Luigi Bellini delle Stelle, d’appartenance monarchiste. Pendant l’inspection, Mussolini est reconnu par le partisan « Bill » (Urbano Lazzaro), puis arrêté. D’abord retenu à Domaso, dans une caserne de la Garde des finances, il est transféré dans la nuit du 27 avril au 28 avril dans une maison de paysan de Bonzanigo.

es commandants de la résistance discutent sur ce qu’il y a lieu de faireN 29 jusqu’à l’arrivée depuis Rome d’un communiqué du Comité de libération nationale (CLN)N 30 qui exprime la nécessité d’une renaissance sociale, politique et morale de l’Italie au travers de l’exécution de Mussolini et la destruction de tous les symboles du parti fasciste présents en Italie. Le document est signé par toutes les composantes du CLN (Parti communiste italien, Parti socialiste italien de l’unité prolétarienne, Démocratie du travail, Parti d’action, Démocratie chrétienne, Parti libéral italien).

La décision est exécutée le 28 avril 1945 ; Mussolini et Clara Petacci sont fusillés, selon la version officielle à Giulino di Mezzegra, à proximité de Dongo par le Comandante Valerio, nom de guerre du communiste Walter Audisio. La première mitraillette s’enraye, la seconde le laisse à l’agonie ; Mussolini est achevé par une arme automatique.

Les dépouilles de Mussolini, de Clara Petacci et des seize autres personnesN 32 sont transportées à Milan. Les corps subissent des outrages. On les pend par les pieds à la balustrade d’un distributeur d’essence sur la place Piazzale Loreto où, l’année précédente, quinze partisans ont été fusillés et exposés en représailles d’un attentat contre les Allemands, et chacun des spectateurs peut s’il le souhaite cracher sur les dépouilles de manière à humilier cette famille et le mouvement fasciste ; ensuite, le visage de Mussolini est défiguré.

Le 29 avril 1945 au soir, le corps de Mussolini est enlevé de la Piazzale Loreto et transféré dans une tombe anonyme au Cimitero Maggiore de Milan. Sa dépouille est dérobée par des militants néo-fascistes du Parti fasciste démocratique dans la nuit du 22 au 23 avril 1946, puis retrouvée en août, cachée dans une malle dans la basilique de la Chartreuse de Pavie tandis que les fétichistes macabres sont arrêtés. Les restes de Mussolini sont confiés aux Franciscains et cachés dans une armoire dans la chapelle du couvent des capucins de Cerro Maggiore afin d’éviter qu’un culte lui soit rendu. Le 30 août 1957, le gouvernement italien, ayant besoin du soutien de l’extrême droite au Parlement, décide de rendre la dépouille à la famille Mussolini qui la transfère dans la crypte de la chapelle familiale dans le cimetière de San Cassiano de Predappio. Chaque année, les nostalgiques du fascisme italien se retrouvent autour de son tombeau, son village accueillant de 80 000 à 100 000 visiteurs par an.

Les circonstances de la mort de Mussolini restent cependant obscures. Des témoignages racontent que le Comandante Valerio a été remplacé en route par le no 2 du Parti communiste italien, Luigi Longo. La « thèse de la correspondance Churchill – Mussolini » est aussi évoquée : l’exécution du Duce aurait été commanditée par des membres de l’Intelligence service qui cherchaient à récupérer la correspondance des deux dirigeants qui négociaient notamment en ce qui concerne leurs empires coloniaux et la lutte contre les partisans communistes, ce qui aurait  compromis Churchill ; de plus, Mussolini conservait les lettres élogieuses de Churchill en monnaie d’échange (jusqu’en 1935, Mussolini a entretenu de bonnes relations avec diverses démocraties d’Europe, en s’opposant avec force à Hitler)203. Selon l’historien Dominique Lormier, lorsque les Alliés apprennent l’arrestation de Mussolini par les partisans, « une course-poursuite s’engage entre les services secrets britanniques et américains pour l’enlever. Winston Churchill, qui veut faire oublier son admiration pour Benito Mussolini jusqu’en 1939, a décidé de le faire liquider afin d’éviter qu’il soit jugé et qu’il parle. Samedi 28, Mussolini et Clara Petacci, qui l’a de nouveau rejoint, sont soustraits des partisans locaux par une équipe de tueurs qui agissent sur ordre de Londres. Sans avertissement, ils sont abattus à la lisière du village Mezzagra. ».

Le seul fait certain est qu’on peut observer qu’en Italie il n’y a pas eu de procès à l’encontre des dignitaires fascistes comparable à celui du procès de Nuremberg contre le nazisme ; en effet, si l’épuration sauvage en Italie a atteint le comble de l’horreur, l’épuration légale a été moins sévère, pour la simple raison que de nombreux accusateurs ont été des fascistes, comme la grande majorité des Italiens ; le ministre de la Justice, Palmiro Togliatti, membre du PCI, décrète une amnistie pour les délits politiques et militaires en Italie le 22 juin 1946.

Source : Wikipédia.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.