Anne-Marie Javouhey, fondatrice de la congrégation des sœurs de Saint-Joseph de Cluny.

Anne-Marie Javouhey, née le 10 novembre 1779 à Jallanges (Côte-d’Or) en Bourgogne, morte le 15 juillet 1851 à Paris, est la fondatrice de la congrégation des Sœurs de Saint-Joseph de Cluny.

Anne-Marie Javouhey naît au sein d’une famille qui comptera dix enfants (quatre mourront jeunes). En pleine Révolution française, elle se consacre à Dieu lors d’une messe clandestine. Adolescente, elle instruit les enfants pauvres de son village de Chamblanc et des alentours. Elle catéchise également et prie longuement devant l’oratoire familial qui se trouve dans le jardin.

Après avoir cherché sa voie auprès de congrégations religieuses, elle est encouragée par l’évêque d’Autun à rédiger en 1804 les règles d’une nouvelle union pieuse regroupant autour d’elle quelques jeunes filles, ainsi que ses trois sœurs, qui prononcent leurs vœux ensemble à l’église Saint-Pierre de Chalon-sur-Saône, en 1807. C’est la naissance d’une congrégation nouvelle, sous le patronage de saint Joseph, pour s’occuper d’enfants pauvres.

En 1809, elle s’installe au grand séminaire d’Autun (actuel lycée militaire d’Autun) des classes mixtes afin de pourvoir à l’éducation des enfants issus du milieu pauvre.

Soeur Anne-Marie Javouhey, carte maximum, Jallanges, 7/02/1981.

En 1812, la congrégation s’installe dans l’ancien couvent des Récollets de Cluny, devenu bien national, qui est racheté par Balthazar Javouhey pour ses filles. La congrégation prend désormais le nom de Saint-Joseph de Cluny. La congrégation qui a pour but l’éducation va se faire remarquer à Paris pour sa qualité. C’est ainsi que les missions outre-mer vont démarrer en 1817. C’est, chronologiquement, la première congrégation de femmes missionnaires.

Elle établit des fondations en France et envoie des religieuses à l’île Bourbon (actuelle Île de La Réunion) en 1817, au Sénégal en 1821, à la Martinique et en Guinée en 1822, à la Guadeloupe en 1823, etc.

soeur Javouhey, essais de couleurs.

Finalement c’est en Guyane qu’elle obtient son premier grand succès.

Elle arrive à Mana à la fin août 1828 avec trente-six sœurs dont vingt-sept converses, trente-neuf agriculteurs adultes dont cinq couples, et onze enfants1. En ajoutant douze ouvriers charpentiers, serruriers, forgerons, etc. qui doivent rejoindre Mana séparément, l’effectif total de l’expédition est de 98 personnes.

L’administration, qui dispose à l’embouchure de la Mana d’un « atelier de noirs » d’au moins trente personnes, subvient comme promis aux besoins de l’expédition pendant les deux premières années, et par une série de décisions prises entre 1828 et 1831, confie gratuitement à Anne-Marie Javouhey des bâtiments1, 15 ha défrichés, et les 120 têtes de bétail laissées par trois familles du Jura reparties en France dans le plus grand dénuement faute d’avoir pu tirer des ressources suffisantes de terres soit trop difficiles à drainer soit trop sablonneuses.

25 ans du point courrier A.M. Javouhey, prêt-à-poster, Senlis, 12/09/2019.

Les colons laïcs de l’expédition ont été engagés pour trois ans pour une solde de 300 francs par an payables à l’expiration de l’engagement. Neuf d’entre eux ont été renvoyés, et à l’expiration de leur engagement, en 1830, tous sauf trois décident de ne pas rester à la communauté, la plupart rentrant en France, et cinq s’établissant à leur compte à Mana dans le commerce du bois. Anne-Marie Javouhey fait face à cette baisse d’effectifs en achetant 32 esclaves noirs, dont quatre enfants. En 1832, trois sœurs sont hospitalières, treize sont employées à des travaux domestiques, treize sœurs, deux colons et dix esclaves adultes sont employés à l’agriculture. Un colon est directeur des travaux. Trois esclaves adultes sont employés à l’élevage, et dix à l’exploitation du bois. La vente de madriers et de planches d’acajou procure des revenus substantiels à la colonie.

En 1835, deux ans après son retour en métropole, elle recueille du gouvernement 520 Noirs, autrefois travaillant sous l’autorité de Cayenne : elle les christianise, les initie à la vie moderne de l’époque et leur apprend un métier, avant de les laisser repartir. Son principe est en effet que la liberté doit pouvoir être assumée financièrement et moralement pour être effective. Elle prouve alors à son temps que les Noirs peuvent être libres et vivre de leur travail. En 1838 elle fait libérer 185 esclaves noirs.

En fait, Anne-Marie Javouhey ne libère aucun esclave à proprement parler, puisqu’elle impose deux conditions à leur affranchissement: un engagement de travail non rémunéré pendant sept ans, qui prolonge en quelque sorte leur esclavage, et leur conversion au christianisme. Plutôt qu’ abolitionnisme, elle « est partisane d’une émancipation graduelle et croit que sous un maître éclairé un esclave est heureux. Pour elle, un bon maître sait créer un attachement profond de la part de l’esclave qui alors consent à son statut de serviteur libre. »

Harcelée par ceux qui craignaient une érosion de la main-d’œuvre servile et s’opposaient à elle, elle arriva néanmoins à influencer beaucoup de propriétaires de plantations pour qu’ils traitent mieux leurs esclaves, et son œuvre put survivre. Lors de l’ abolition de l’esclavage, il n’y eut pas de grandes émeutes de la part des Noirs, en grande partie à cause des meilleures conditions de vie, comparées à celles des autres esclaves de Guyane, qu’elle avait pu obtenir pour eux. Une majorité d’entre eux s’étaient convertis au christianisme et baptisaient volontiers leurs enfants.

Auteur prolifique, elle écrira un journal aujourd’hui publié sous la forme de quatre grands volumes, où elle parle surtout de la Guyane.

À son retour en France, elle fonde un petit séminaire d’où sortiront les premiers prêtres indigènes du Sénégal, dont l’abbé Boilat, auteur des Esquisses sénégalaises (1853).

Femme forte, entreprenante et réfléchie, Anne-Marie Javouhey sait tout accueillir et y discerner l’essentiel. Elle ne se contente pas de soulager la misère; elle travaille aussi à instaurer un ordre social plus conforme à l’Évangile.

« La Supérieure générale est ici pour quelques jours ; ses 70 ans n’ont affaibli ni sa santé, ni sa mémoire, ni son énergie, ni son esprit entreprenant ; elle vient de Brest où elle a embarqué 32 jeunes religieuses pour diverses colonies, elle va en choisir d’autres ; en octobre prochain, elle ira à Rome protégée par le nonce qu’elle y trouvera, qu’elle a vu à Paris et par qui elle sera présentée au Saint Père. Elle fera ce voyage plus lestement que je ne fais celui de Cluny à Daron ; elle me parlait hier de son séjour en Sierra Leone, de la Guinée, de Gorée, comme s’il n’y avait rien de plus simple que de parcourir la côte d’Afrique. Si son esprit avait été cultivé, sa mémoire meublée par une solide instruction, ce serait une femme bien remarquable car elle l’est sans toute cette culture. » écrit à son sujet, dans une lettre datée du 8 août 1850, madame Rogniat, épouse d’un préfet de la Restauration, peu après un séjour effectué au château de Saint-Point, demeure du poète Alphonse de Lamartine.

À sa mort à Paris le 15 juillet 1851, 1 200 religieuses se trouvent sur les cinq continents.

Elle fut d’abord enterrée dans la crypte du collège Anne-Marie Javouhey à Senlis. Puis sa dépouille fut transportée au cimetière du Père-Lachaise. Son cœur est une relique déposée dans la chapelle Saint-Joseph-de-Cluny à Paris.

En 2010, les Sœurs de Saint-Joseph de Cluny sont plus de 3 000 sur les cinq continents.

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Sources : Wikipédia, YouTube.